Lamentations 3, 1-33

Méditations sur la Passion du Seigneur

Jean de Fécamp

Le livre des Méditations, chapitre 6 à 9, VS 70, 1944, p. 212s

        Jetez les yeux, Père très clément sur votre Fils très clément, qui a pour moi souffert une telle inclémence. Que la vue de sa souffrance, Roi très bon, vous fasse ressouvenir avec bienveillance de celui pour qui il souffre. N’est-ce pas, ô mon Seigneur, ce Fils innocent que vous avez livré pour racheter votre serviteur ? N’est-il pas l’auteur de la vie, Lui qui s’est laissé mener comme une brebis à la tuerie, Lui qui s’est fait à vous obéissant jusqu’à la mort, et n’a pas craint de subir la mort la plus atroce ? Songez, ô vous qui avez disposé toute l’ordonnance du salut, que si, sans doute, vous L’avez engendré de votre puissance, vous avez néanmoins voulu Le rendre aussi participant de ma faiblesse. Ce que vous apercevez là, c’est vraiment votre divinité, qui revêtue de ma nature, est monté sur le gibet de la croix, et a supporté dans la chair qu’elle a assumé, un dur supplice. Seigneur mon Dieu, ramenez le regard de votre majesté sur l’œuvre de votre ineffable bonté. Considérez le corps écartelé de votre doux Fils, voyez couler de ses mains innocentes son sang sacré ; et ainsi, apaisé, remettez les crimes qu’ont accomplis mes mains. Contemplez ce côté sans défense, férocement ouvert d’un coup de lance ; et renouvelez moi dans cette source sainte et sacrée. Voyez : ces pieds immaculés qui ne se sont pas tenus dans la voie des pécheurs, mais ont toujours marché dans votre loi, les voici cruellement percé de clous ; affermissez donc mes pas dans vos sentiers, et faites, par votre bonté, que je prenne en haine toute voie d’iniquité. La voie de l’iniquité, que votre miséricorde la détourne de moi, que votre faveur me fasse choisir la voie de la vérité. Je vous en prie, Roi des saints, par ce Saint des saints, par ce mien Rédempteur, faites-moi courir la voie de vos commandements, afin que je puisse être uni d’esprit à Celui qui n’a pas eu horreur de se revêtir de ma chair. Regardez, Créateur plein de tendresse, l’humanité de Celui que vous avez engendré, et, dans votre amour, prenez en pitié la faiblesse de celui que vous avez créé fragile. Voyez sa poitrine mise à nu, son côté rouge de sang, les lumières de ses yeux sont éteintes, ses lèvres sont toutes pâles, ses bras étendus sont tout raides, ses jambes pendent, son sang bienheureux arrose ses pieds transpercés. Voyez le supplice du Rédempteur, et remettez la faute de celui qu’il rachète. C’est Lui, Seigneur, que vous avez frappé à cause des péchés de votre peuple, Lui qui est cependant le bien aimé en qui vous avez mis vos complaisances. Il est cet innocent en qui n’a pas été trouvé de fourberie et que cependant on a compté parmi les malfaiteurs.