Osée 13,1 + 14,1

« Ô mort, je serai ta mort ; enfer, je serai ta ruine Paul VI»

Saint Augustin

Sermon 161, OC 20, p. 265

 

        Frères, livrons-nous dignement en Jésus-Christ à de pieux transports en nous rappelant ce fameux troisième jour, riche des dépouilles de l’enfer, le Très-Haut du fond de l’abîme, la lumière du sein des ténèbres, la vie d’entre les morts. Voilà combien, pour le salut des brebis égarées, l’affectueuse sollicitude du bon pasteur se multiplie. En un seul et même temps, il daigne rappeler l’homme jusque dans le paradis, et poursuivre la mort jusque dans les enfers, pour l’enchaîner avec plus de gloire dans son propre royaume, pour en triompher avec plus d’éclat dans sa propre demeure. Le Seigneur du ciel descend aux enfers, dont les profondeurs s’ouvrent devant ses pas, et les ténèbres éternelles s’étonnent de la lumière inconnue qui les visite. Ce n’est pas du spectacle soudain des morts qui la peuplent que s’épouvante la nuit ; c’est sa propre mort qu’elle redoute. Il était là, Celui qui naguère avait dit par son prophète Osée (13,14) : Ô mort, je serai ta mort ; enfer, tu souffriras ma morsure. Aussi loin de trouver en lui rien dont elle put s’emparer, elle dut le voir, en témoin impuissant, lui ravir son ancienne proie vers le ciel. Elle attendait un tributaire, et ce fut un conquérant ; un captif qu’elle allait charger de l’infernale chaîne, et ce fut un libérateur, qui s’en retourna bientôt à ses yeux étonnés avec les autres captifs dont il avait brisé les fers. Elle n’avait vu qu’un homme en lui, quand il descendait ; elle reconnut Dieu quand il remonta.

        Assurément, notre Seigneur aurait pu terrasser l’ennemi du genre humain pour l’effet de sa seul puissance, sans s’humilier jusqu’à l’Incarnation, sans soutenir le combat de la croix. Mais l’homme, qui gémissait sous le joug comme coupable de désobéissance volontaire, et qui avait encouru la servitude par sa faute, ne devait pas être délivré par la force, il devait être racheté par la miséricorde. Dieu, la justice et l’équité même, est à lui-même sa loi ; quant à l’homme, doué de jugement et de volonté, d’activité volontaire et libre, dès que sa chute avait été volontaire, il n’était pas juste qu’il fût relevé malgré lui. Il a été plus équitable et plus salutaire, puisque le démon s’était servi de son orgueil pour l’entraîner vers la mort, que Dieu le rappelât à la vie au moyen de l’humilité.