Exode 13, 1-16

Le premier-né

Père Divo Barsotti

Spiritualité de l’Exode, p. 113s

         Tout premier-né doit être consacré à Dieu. Les premiers-nés des Egyptiens appartiennent à Dieu ; il les a sacrifiés, consumés, détruits, il les a arrachés au peuple égyptien pour les reprendre. Appartenir à Dieu, cela veut dire être sacrifié, immolé. Dieu ne prend possession d’une chose qu’à l’instant où elle est détruite, soustraite à tout usage profane, consumée par le feu. Ainsi le sacrifice de louange, exclusivement réservé au Seigneur, ne comportait même pas une communion avec la victime, tout devant être consumé par le feu sur l’autel du sacrifice.

         Le premier-né est consacré à Dieu, il doit être arraché à tout emploi profane et réservé à Dieu. Mais on ne peut arracher une créature à tout usage profane qu’en lui ôtant la vie : le sacrifice démontre que Dieu entre en possession de sa créature.

         Qui est- ce premier-né, premier fruit de la création ? Saint Paul dit que Jésus est le premier-né d’entre de nombreux frères. Le premier né de tous les hommes, de tous les animaux dont parle l’Exode, n’est qu’une image, signe, prophétie, annonce du premier-né de toute la création ; ce premier-né est Jésus qui est même plus que le premier-né, il est le Fils Unique. C’est dans le Christ que la création couronne l’œuvre de sa propre fécondité : le Christ est le fruit de la terre, la terre a donné son produit (Ps 6,7), et le Christ doit être offert au Seigneur.

         La création ne vit qu’en ce qu’elle offre. Elle offre tout ce qu’elle a, ce qu’elle possède, ce qu’elle engendre, ce qui vit par elle : Jésus. La vie de l’univers se consomme dans l’offrande du premier-né, du Fils Unique à son Père. Dans l’antique Israël, le premier-né était racheté ; en échange, un agneau était offert ; la substitution était alors possible parce que ce premier-né n’était qu’une figure. Mais Dieu n’a pas voulu que Jésus soit remplacé pour le sacrifice : il doit être immolé.

         Aux antiques holocaustes qui n’étaient que des figures a succédé le vrai sacrifice : Jésus est offert. Jésus est immolé, Jésus meurt ; toute la vie de la création se résume en cette offrande du Christ. Ainsi l’eucharistie qui rend cette offrande présente est-elle l’acte qui consomme la vie de la création. L’eucharistie n’est plus seulement l’offrande que le Christ fait de lui-même à son Père, c’est l’offrande que l’Eglise fait du Christ au Père, l’offrande que l’humanité fait du Christ au Père : l’humanité et l’Eglise possédant en la personne du Christ leur Fils, leur premier-né, leur Fils Unique pourrait-on dire.

         Toute la vie d’Israël ne sera que souvenir : Tu te rappelleras. Toute la vie de l’Eglise sera un souvenir efficace qui renouvelle sans cesse l’événement : Faites ceci en mémoire de moi. Souvenir efficace : Toutes les fois que vous mangerez ce pain…