Jean 20, 11-18

« Ne me touche pas »

Saint Augustin

Commentaire de la première épître de saint Jean, SC 75, p. 187s

        Toucher Jésus spirituellement par le cœur, c’est connaître qu’Il est égal au Père. Voilà pourquoi il défendait à Marie de Le toucher, et lui disait : Ne me touche pas, car je ne suis pas encore remonté vers mon Père. Qu’est-ce à dire ? Il se laisse toucher par ses disciples, et Il se dérobe aux mains de Marie ? Au disciple qui doutait encore, n’est-ce pas lui qui a dit : Mets ici tes doigts, et touche mes cicatrices. Etait-Il déjà remonté vers le Père ? Pourquoi dès alors cette défense faite à Marie et pourquoi lui dire : Ne me touche pas, car je ne suis pas encore remonté vers mon Père ? Dirons-nous qu’il n’a pas craint de se laisser toucher par des hommes, et qu’Il a craint de se laisser toucher par des femmes ? Mais son contact purifie toute chair ! Elles, les premières à qui Il a voulu se manifester, il aurait craint de se laisser toucher par elles ! Les femmes ne furent-elles pas les premières messagères de la Résurrection auprès des hommes, afin que le serpent fût vaincu par sa propre tactique, jouant en sens contraire ? Car c’est par la femme que le serpent fit parvenir au premier homme un message de mort, et c’est par la femme qu’est venu aux hommes le message de vie. Pourquoi donc le Christ n’a-t-il pas voulu se laisser toucher, sinon pour nous faire comprendre ce qu’est le toucher spirituel ?

Le toucher spirituel est celui d’un cœur pur. Celui-là touche le Christ d’un cœur pur, qui comprend qu’il est égal au Père. Par contre, celui qui n’a pas encore compris que le Christ est Dieu, va jusqu’à la chair, ne va pas jusqu’à la divinité. Est-ce un grand mérite d’aller, dans la connaissance du Christ, jusqu’où sont allés les bourreaux qui le crucifièrent ? Ce qui est un grand mérite, c’est de comprendre qu’il est le Verbe, Dieu auprès de Dieu dès le commencement, Créateur de toutes choses. Il voulait être reconnu pour tel quand il dit à Philippe : Depuis si longtemps, je suis avec toi, et tu ne me connais pas, Philippe ? Qui me voit, voit aussi mon Père.