Marc 13, 33-37

« Veillez et priez »

Evagre le Pontique

Philocalie des Pères Neptiques, Bellefontaine, Fascicule 8, p. 52s

 

Si tu aspires à prier, renonce à tout pour obtenir le tout.

Vois si tu es vraiment présent à Dieu dans ta prière, ou si tu es vaincu par la louange humaine et poussé par le désir de la capter, en exploitant le prétexte de la longueur dans ta prière.

Que tu pries avec des frères ou seul, tâche de prier non par habitude, mais avec sentiment.

Qui aime Dieu, converse toujours avec lui comme avec un père, se dépouillant de toute pensée passionnée.

Si tu veux prier, tu as besoin de Dieu, lui qui donne la prière à celui qui prie. Invoque-le donc en disant : Que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, c’est-à-dire : Que ton Esprit soit reconnu comme saint, et que vienne ton Fils unique, car c’est ce qu’il a enseigné quand il a dit d’adorer le Père en esprit et en vérité. Celui qui prie en esprit et vérité ne glorifie plus le Créateur à partir des créatures, mais c’est de Dieu même qu’il loue Dieu.

Si tu es théologien, tu prieras vraiment, et si tu pries vraiment, tu es théologien.

Le Saint-Esprit, compatissant à notre faiblesse, nous visite même non encore purifiés ; pourvu seulement qu’il trouve notre intelligence priant avec sincérité, il survient en elle et dissipe toute la phalange des raisonnements et des pensées qui l’assiège et la porte à l’amour de la prière spirituelle.

Si tu aspires à prier, ne fais rien de tout ce qui est incompatible avec la prière, afin que Dieu s’approche de toi et fasse route avec toi.

Ne te représente pas une figure de Dieu en toi quand tu pries ; ne laisse pas ton intelligence subir l’impression d’aucune forme, mais va immatériel à l’immatériel, et tu comprendras.

Si tu t’appliques à la prière, prépare-toi aux assauts des démons ; prends garde aux pièges de l’adversaire : il arrive, quand tu pries purement et sans trouble, que soudain une forme inconnue et étrangère se présente à toi pour t’entraîner à la présomption d’y focaliser Dieu et de faire prendre pour la divinité l’objet si soudainement apparu à tes yeux.

Prie comme il faut et sans trouble ; psalmodie avec attention et harmonie. La psalmodie calme les passions, apaise l’intempérance du corps. Si tu n’as pas encore reçu le charisme de la prière, ou de la psalmodie, obstine-toi, et tu recevras.