Jean 15, 1-8

« Le suis la vigne, vous les sarments : demeurez en moi »

Père Xavier Léon-Dufour

Lecture de l’évangile de Jean, tome III, p. 167s

 

La comparaison avec le sarment éclaire le pourquoi de l’impératif : Demeurez en moi. La figure végétale est sollicitée : on n’a jamais vu des sarments libre demeurer ou non dans la vigne ! Pourtant la nécessité pour les disciples d’exister en Jésus, afin de pouvoir porter du fruit, puise là son évidence. Revient alors la révélation de l’exorde : Je suis, moi, la vigne ; elle est complétée ici non par l’évocation du Père, mais par vous êtes les sarments.

Voilà une nouvelle image pour dire la relation du Fils et des croyants, de l’UN et du multiple. Le MOI de la vigne et le VOUS des sarments ne sont pas en vis-à-vis : les sarments sont dans la vigne, ils n’existent que par la vigne qui les porte. Le disciple est transfiguré du dedans : son nouvel être est celui du Fils. Ainsi se trouve réalisé le projet de Dieu qui a créé Adam à son image.

D’autre part, l’amour requérant l’existence des deux, il n’y a jamais fusion, ni confusion de Dieu et de l’homme. Aussi la révélation sur la vigne se double-t-elle d’une exigence radicale : devenu, grâce à la Parole, un sarment de la vigne unique, le disciple ne demeure tel que par sa fidélité propre, toujours recommencée. Dépendant d’un Autre, sa vie nouvelle exige de lui un consentement qui lui est personnel et qui n’est jamais achevé.

Le but que vise l’émondage des sarment est justement cette véritable synergie entre le Fils et ses disciples. Cela aboutit à une phrase lapidaire : Hors de moi, vous ne pouvez rien faire, qui évoque le verset du prologue de notre évangile concernant la création par le Logos : Hors de lui, rien ne fut. Elle doit être comprise non pas comme déniant à l’homme toute capacité, mais selon la perspective du fruit qui régit le contexte. Il s’agit pour le disciple d’accueillir en soi l’activité de Jésus et de permettre ainsi à l’Amour, expansif par nature, de susciter la vie.

Si les croyants sont exhortés à demeurer en Christ, ce n’est pas uniquement pour les mettre en garde contre l’infidélité qui les guette et pour leur rappeler la condition sine qua non de fruit. C’est aussi pour manifester à quel point est réelle leur appartenance, leur identification au Christ.