Esther 1, 1-12

Portée religieuse du livre d’Esther

 

Père Barucq

Bible de Jérusalem, Fascicule Judith, Esther, p. 82s 

Du livre d’Esther se dégage le sentiment d’une foi confiante. Malgré le caractère religieusement neutre de ce texte, il est évident que l’auteur est convaincu de l’action incessante de Dieu en faveur de son peuple.

Jamais nommé, Dieu mène tous les événements du drame, et les acteurs le savent. Si Mardochée est parvenu à un poste important, c’est en tant que Juif, membre du peuple de Dieu. Le lecteur pense tout naturellement à la providence divine envers Joseph ou Daniel. Il en est de même pour Esther. Son accession au trône royal a un sens. C’est ainsi que s’accompliront les desseins miséricordieux de Dieu sur son peuple. Le jeûne d’Esther et de ses suivantes, la pénitence publique de Mardochée sont peut-être des marques de douleur, mais ils visent aussi à se rendre Dieu favorable.

Mardochée affiche une confiance invincible dans le salut de son peuple, alors même que la reine se déroberait à toute démarche. Comme tout bon Juif, Mardochée a une conception très religieuse de la rétribution morale. En face de lui le juste, le serviteur intègre, désintéressé, loyal, se dresse Aman, intrigant, fat, susceptible, cruel. En bonne logique, le juste doit triompher du méchant. Qui donc opérera le renversement, sinon Dieu ? L’auteur tait le nom divin, mais il suppose toujours Dieu en pleine action, conformément à la foi d’Israël. N’est-ce pas Lui qui a délivré Daniel des mains de ses accusateurs ?

Dans ce livre d’Esther, l’outrance même des situations et l’emphase du récit se chargent de désarmer notre scandale. L’auteur n’a rien voulu d’autre qu’illustrer le thème du retournement des situations en faveur des opprimés. Il fallait donc bien que le dessein perpétré par Aman et ses partisans retombât sur leurs têtes. Jésus n’était pas encore venu dire aux Juifs, prompts à confondre sans discernement les intérêts de Dieu et les leurs : Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes !