Matthieu 21, 28-32

La parabole des deux fils

Saint Jean Chrysostome

Homélie 67 sur saint Matthieu, OC 12, p. 555s

 

          Comme les disciples de Jésus, vous venez d’entendre une parabole. Et Jésus de poser à ses auditeurs une question : Lequel des deux, à votre avis, a fait la volonté de son père ? Jésus, une fois de plus, reprend les siens au moyen de paraboles ; il se sert d’une parabole pour mener les siens là où il voulait. Dès qu’ils se furent prononcés, sans trop bien  comprendre la portée de leurs paroles, le Sauveur leur découvre le fond de sa pensée : les publicains et les prostituées vous précèderont dans le Royaume de Dieu. Si le Seigneur se fût contenté de leur dire : Les prostituées vous précèderont, ce langage leur eût semblé dur ; après la sentence qu’ils ont portée eux-mêmes, cette sentence prend un caractère plus adouci. Aussi le divin maître indique-t-il le motif de cette condamnation. Et ce motif, quel est-il ? Jean est venu jusqu’à vous. Jusqu’à vous, mes disciples, et non à elles, les prostituées. En effet, Jean est venu en suivant les voies de la justice ; vous ne sauriez l’accuser d’avoir mené une vie oisive et négligée, car sa vie a été admirablement disposée à faire le bien. N’importe, vous n’avez fait aucune attention à lui, ce que n’ont pas fait les publicains et les prostituées ! Vous êtes pleinement inexcusables : le précurseur vient à vous et vous le repoussez ; il ne vient pas à eux et ils le reçoivent, et vous n’acceptez pas l’autorité de leur exemple.

          Frères, n’allez pas vous décourager parce que vous êtes pécheurs ; ne vous abandonnez pas non plus à une excessive confiance parce que vous êtes justes. Il arrivera plus d’une fois qu’un juste sera laissé en arrière par une prostituée ou un publicain. Cependant, il ne faut pas que le pécheur se livre au désespoir, car il lui est possible de dépasser ceux qui occupent le premier rang. Ecoutez ce que disait le Seigneur à Jérusalem par la voix du prophète Jérémie : Après qu’elle a eu commis toutes ces fornications, je lui ai dit : Convertis-toi, et elle ne s’est pas convertie (3,7). D’où il suit que Dieu oublie nos fautes passées lorsque nous nous mettons à l’aimer avec ardeur. Dieu n’agit pas comme l’homme, il ne nous faut pas honte de ce qui n’est plus et ne nous dira pas si nous faisons pénitence, Pourquoi rester si longtemps éloigné de moi ?, dit-il. Il ne nous témoigne que de l’amour quand nous allons vers lui ; seulement, à nous d’aller à lui comme il convient. Attachons-nous donc étroitement à lui, et transperçons nos cœurs de sa crainte.