Apocalypse 21, 1-8

Un ciel nouveau, une terre nouvelle

Père Michel Coune

L’univers nouveau, AS 26, p. 68s

        Avec une pointe de sagesse désabusée, Qohélet ressassait son monotone refrain : Non, il n’y a rien de nouveau sous le soleil, et sans doute avait-il raison au niveau de la simple expérience humaine. Toutefois, le Christ, qui appelle tout être à se renouveler, vient bouleverser cette sagesse : A moins de naître d’eau et d’Esprit, nul ne peut entrer au Royaume de Dieu. Nous savons que cette régénération doit gagner l’univers entier destiné à être rénové. Cette conviction habitait saint Paul et les premiers chrétiens ; en cette même attente, l’apôtre Jean atteste avoir vu un ciel nouveau et une terre nouvelle.

        Comment interpréter correctement cet avènement d’un univers nouveau ? Faut-il imaginer ces bouleversements à la manière de la deuxième lettre de Pierre, écrit tardif influencé par l’eschatologie stoïcienne et l’incendie mondial, tel que Lucrèce l’a vulgarisé ?

        Dieu opère-t-il une création radicalement nouvelle pour ses élus, ou les métaphores bibliques signifient-elles seulement le renouvellement complet des choses anciennes qu’apporte le règne du Messie ? Plutôt qu’à sa dissolution totale, ne peut-on songer, dans la ligne des oracles deutéro-isaïens, à une épuration et à une restauration de l’univers ? Ne vous souvenez plus d’autrefois, ne songez plus aux choses passées : voici que je vais faire du nouveau qui déjà paraît, ne l’apercevez-vous pas, lisons-nous chez Isaïe (43,18-19).

        Bien des gens croient que ce monde doit périr entièrement, et que Dieu, comme il a tiré du néant le ciel, la terre et tous les éléments, les y fera entrer pour en créer d’autres plus beaux, plus purs et plus resplendissants. Jean ne dit pas cela, ni que l’éternité immuable a englouti notre temps mouvementé. La création ancienne est terrestre, passagère ; la nouvelle est céleste, elle durera toujours. Toutefois, elle reste ciel et terre, c’est-à-dire création à la mesure des hommes. Dieu a créé le monde pour sa gloire et le mettra en état de le glorifier convenablement à la fin des temps, ce pour quoi il l’a tiré du néant. Pour le chrétien, il ne s’agit ni de rêve, ni d’imagination poétique, mais d’une ferme affirmation de sa foi. La figure de ce monde visible passe, et quand l’humanité, son couronnement, aura atteint à la plénitude de l’âge du Christ, la création tout entière accèdera aussi à un état parfait, entièrement rajeuni et transfiguré.