Sur Exode 18, 13-27
Moïse accepte le conseil d’un païen

Origène
Homélies sur l’Exode, Sources Chrétiennes 321, p. 343s

Ce n’est pas en vain que Jéthro est venu vers Moïse : il vient lui donner un conseil fort utile et louable, celui de choisir des hommes pour les instituer comme chefs du peuple, des hommes emplis de la crainte de Dieu, des hommes de valeur ayant l’arrogance en horreur. Tels doivent être les chefs du peuple, non seulement sans orgueil, mais le haïssant, eux-mêmes exempts de vices et les haïssant chez les autres ; je ne dis pas haïssant les hommes, mais les vices.
Tu les établiras comme chefs de milliers, chefs de centaines, chefs de cinquantaines et de dizaines ; ils jugeront le peuple à tout moment, mais pour les affaires graves, ils en réfèreront à toi.
Quand je vois Moïse, ce prophète rempli de Dieu, à qui Dieu parlait face à face, accepter un conseil de son beau-père Jéthro, un païen prêtre de Madian, une admiration extrême me jette dans la stupeur. L’Ecriture dit : Moïse écouta la voix de son beau-père, et fit tout ce qu’il lui avait dit. Il n’objecta point : Dieu s’entretient avec moi, ce que je dois faire m’est dicté par une parole céleste ; comment accepter le conseil d’un homme, d’un païen étranger au peuple de Dieu ? Moïse écoute son beau-père, fait tout ce qu’il lui dit, attentif non à celui qui parle, mais à ce qu’il dit.
Nous aussi, s’il nous arrive parfois de trouver une opinion exprimée avec sagesse par un païen, nous ne devons pas d’emblée, par le seul fait que c’est un païen qui s’exprime, mépriser ce qu’il dit. Ce n’est pas parce que nous sommes en possession de la Loi donnée par Dieu que, gonflés d’orgueil et de suffisance, mépriser les paroles exprimées par des sages ; comme dit l’Apôtre : Vérifiez la valeur de toute chose, et ce qui est bon, retenez-le ! Qui donc, aujourd’hui, parmi ceux qui dirigent les peuples, daigne accepter un conseil d’un prêtre inférieur, pour ne rien dire d’un laïc, à plus forte raison d’un païen ? Moïse, lui, qui était le plus doux de tous les hommes, accepta le conseil d’un inférieur, donnant ainsi aux chefs des peuples un modèle d’humilité.