sur Luc 10, 1-9

Saluez la maison

 

Saint Ephrem de Nisibe

Commentaire du l’Evangile concordant, SC 121, p. 159s

 

A la maison dans laquelle vous entrerez, dites d’abord : Salut, pour que le Seigneur lui-même y entre et y séjourne, comme auprès de Marie, et qu’ensuite y séjournent ses disciples  en tant que disciples. Cette salutation est le mystère de sa foi rayonnante dans le monde ; par elle, l’inimitié est étouffée, la guerre arrêtée et les hommes se reconnaissent mutuellement. L’effet de cette même salutation était dissimulé par le voile de l’erreur, malgré la préfiguration du mystère de la résurrection des corps, mystères qu’expriment  les choses inanimées, quand arrive la lumière et qu’apparaît l’aurore qui chasse la nuit. A partir de ce moment, les hommes commencèrent à se donner l’un à l‘autre cette salutation et à la recevoir les uns des autres pour qu’elle guérisse celui qui la donne et bénisse ceux qui la reçoivent. Mais sur ceux qui ne reçoivent qu’extérieurement la parole de salutation, et dont les âmes ne portent pas l’empreinte des membres de Notre Seigneur, la salutation se répand comme une lumière changée par ceux qui la reçoivent, de même que les rayons du soleil le sont par le monde.

Cette salutation que son nom annonce, dont la science explique la puissance cachée, et que règle un symbole, suffit amplement pour tous les hommes. C’est pourquoi Notre Seigneur l’envoya avec ses disciples, comme précurseur, pour qu’elle fasse la paix, et qu’enveloppée dans la voix des apôtres, ses envoyés, elle prépare la voie devant eux. Elle était semée dans toutes les maisons pour en recueillir et en trier les membres ; elle entrait dans tous ceux qui l’entendaient pour séparer et mettre à part ses fils qu’elle reconnaissait ; elle restait avec eux, et dénonçait ceux qui lui étaient étrangers, car, une fois semée en ceux-ci, elle les quittait.

Cette salutation ne tarissait pas, jaillissant des apôtres dans leurs frères, pour dévoiler que les trésors du Seigneur qui l’envoyait ne s’épuisent pas. Elle ne se transformait pas dans ceux qui l’accueillaient, manifestant ainsi que les dons du donateur étaient sûrs et stables. Présente dans ceux qui la donnaient et dans ceux qui l’accueillaient, cette salutation n’en subissait ni diminution, ni division. Du Père, elle annonçait qu’il est près de tous et en tous ; de la mission du Fils, qu’il est tout entier auprès de tous, et que sa fin est auprès de son Père. Image du Père, elle ne cessa pas de prêcher, et ne se lassa pas de proclamer jusqu’à la venue de la certitude qui accomplit les figures typiques, jusqu’à ce que la vérité mette fin aux images, que les ombres soient repoussées par le corps lui-même et les symboles dispersés par les vraies représentations.