Sur Hébreux 12, 14-29
Qui touchera la « montagne » ?
Saint Grégoire de Nysse
La vie de Moïse, SC 1bis, p. 207s

La contemplation de Dieu ne s’exerce ni dans le domaine de la vue, ni dans celui de l’ouïe, elle échappe même à l’activité ordinaire de l’intelligence. Celui qui va aborder la connaissance des choses d’en-haut, doit purifier auparavant sa conduite de tout mouvement sensible et animal. Ce n’est qu’après avoir lavé son esprit de toute opinion née de la perception, après s’être écarté de toute sensibilité, s’en être purifié, qu’il affrontera enfin la montagne.
C’est en effet une montagne escarpée et d’accès vraiment difficile que la connaissance de Dieu. A peine la foule peut-elle parvenir à sa base. Mais s’il s’agit de quelque Moïse, il pourra parvenir très avant dans la montée et percevoir le son des trompettes qui devient plus fort à mesure que l’on avance. La véritable trompette qui frappe l’oreille, c’est la prédication de la divinité, qui, puissante dès l’abord, devient plus forte et frappe davantage les oreilles dans les derniers temps. La Loi et les Prophètes ont proclamé le mystère divin de l’Incarnation, mais ces premiers sons étaient trop faibles pour parvenir à des oreilles indociles. Le son des trompettes devint progressivement de plus en plus fort. Les derniers sons, qui représentent la prédication de l’Evangile, ont frappé les oreilles, le Saint-Esprit, par le moyen des instruments, retentissant de façon plus éclatante alors et rendant un son plus distinct : quant aux instruments, ce sont les Prophètes et les Apôtres, résonnant sous le souffle de l’Esprit-Saint, eux dont il est écrit dans le Psautier que leur voix s’est répandue sur toute la terre et leurs paroles jusqu’aux extrémités du monde.
Que si l’ensemble ne peut entendre la voix qui vient d’en-haut, mais charge Moïse de prendre par lui-même connaissance des mystères cachés pour communiquer ensuite au peuple les doctrines qu’il aura reçues de l’enseignement d’en-haut, cela aussi se retrouve dans l’économie de l’Eglise : tous ne cherchent pas à pénétrer dans l’intelligence des mystères, mais ils choisissent quelqu’un parmi eux qui soit apte à percevoir les choses divines et ils lui prêtent volontiers l’oreille ensuite, jugeant digne de foi tout ce qu’ils entendent de celui qui a été initié aux secrets divins.