Sur Apocalypse 12, 1-18

A la lumière de la christologie du Nouveau Testament

Père Felice Montagnini

Le « Signe » d’Apocalypse 12, NRT 89, p. 412s

 

La lumière de cette vision de l’Apocalypse vient en bonne part du fait du caractère dynamique de son signe. Puisqu’il est dynamique, difficile de le chercher dans la figure de la femme, comme dans celle du dragon. En ce chapitre de l’Apocalypse, en fait, il y a deux signes : ils ne sont pas constitués par les deux apparitions, mais bien par les actes dont la femme et le dragon sont les protagonistes. Les descriptions se développent en strict parallélisme. On présente d’abord la figure : au verset 1, une femme enveloppée de soleil, la lune sous ses pieds, et sur sa tête une couronne de douze étoiles ; au verset 3, un énorme dragon, couleur de feu, ayant sept têtes et dix cornes, et sur ses têtes sept diadèmes. Ensuite, l’action prend valeur de signe : au verset 2, la femme est enceinte, et elle crie dans les douleurs et les tortures de l’enfantement ; au verset 4, la queue du dragon entraîne le tiers des étoiles du ciel et les précipite sur la terre. Il n’y a pas d’opposition entre le caractère dynamique du signe, et le fait que qu’on le voit. Dans les deux, en effet, on lit que le signe apparaît. Etre vu, apparaître, n’est pas dans le langage apocalyptique autre chose que se réaliser. C’est bien le cas ici, car s’il fallait prendre le verbe apparaître à la lettre, le double signe de ce chapitre serait différent de tous les autres signes de la Bible, spécialement ceux de la littérature johannique ; il désignerait non un événement, mais une figure, et il serait dépourvu du dynamisme qui le caractérise. Il faut noter que c’est ici le seul cas où l’on dise qu’un signe apparaît ; partout ailleurs les signes sont opérés. Ces deux signes antithétiques qui se réalisent et le choc qui se produit entre eux sont donnés à l’Eglise pour qu’elle reconnaisse définitivement l’objet de sa foi.

Nous voici en mesure de lire ce passage : la mère du Messie est l’Eglise ; elle donne naissance au Christ en tant qu’elle le comprend dans toute la gloire de sa mission. L’enfantement est douloureux, parce que l’Eglise a de la peine à accepter l’élément de souffrances qu’implique la vision intégrale du Messie. La reconnaissance douloureusement conquise est en butte aux attaques du dragon, figuration des puissances infernales qui s’articulent sur l’empire romain et sa prétention divine. Tandis que le Messie mystiquement enfanté au milieu des douleurs est en possession de sa gloire, l’Eglise qui lui a donné naissance est soumise à la vengeance du dragon, qui l’oblige à souffrir une terrible persécution, symbolisée de façon transparente par le séjour d’un temps et des temps et la moitié d’un temps au désert. Et ce n’est pas tout : alors même que l’Eglise comme telle est désormais en sécurité par rapport aux attaques contre sa foi, ses enfants restent toujours exposés aux embûches du dragon, qui n’entend désarmer.