Sur Apocalypse 21, 1-8

Les cieux nouveaux et la nouvelle terre

Père Jean-Noël Aletti

Essai sur la symbolique céleste de l’Apocalypse de Jean, Christus 109,p.49s

 

Peut-on distinguer entre le ciel divin, tel qu’il est décrit au chapitre 4 de  l’Apocalypse, et le ciel de la fin des temps ? Autrement dit, le ciel nouveau dans le texte (21,1) que nous venons de lire est-il seulement un ciel cosmique ou est-il également un ciel divin qui se substituerait à celui où le voyant est appelé ? En effet, si Dieu est présent avec son trône (22,3) dans la Jérusalem nouvelle, que va devenir le ciel cosmique du chapitre 4? Et la liturgie céleste à laquelle a assisté le voyant n’est-elle pas destinée elle aussi à disparaître ?

Notons d’abord qu’il y a des points communs entre le ciel du chapitre 4 et la Jérusalem nouvelle. L’un et l’autre sont décrits comme des lieux lumineux d’où l’obscurité est exclue : les pierreries (jaspe et émeraude), et l’or en sont les éléments constitutifs ; ils sont tous deux le siège de la présence glorieuse et royale de Dieu, où l’adoration est de règle ; lieux de félicité pour tous les élus qui ont revêtu la robe blanche.

Mais il y a des différences. La Jérusalem nouvelle n’a pas de temple, et si chacune de ses douze portes est gardée par un ange, le texte ne dit pas que l’armée céleste, désormais au repos forcé, tous les ennemis ayant été terrassés, y prend place, puisque la cité est nommée « demeure de Dieu avec les hommes » (21,3). Exagérer ces différences ou tenter de les harmoniser mènerait à des impasses, car les influences et la pointe du texte permettent d’en expliquer les anomalies. La fonction de ces deux chapitres 21-22 de l’Apocalypse est de souligner la présence totale, définitive de Dieu parmi les hommes en utilisant principalement Isaïe 60 et Ezéchiel 47-48. Car tel est bien le plus important : à la fin des temps, l’opposition ciel/terre ayant cessé, les hommes n’auront plus à monter au ciel pour contempler la gloire de Dieu ; Dieu lui-même, avec l’Agneau, descendra parmi eux et sera lumière. Il n’est plus question ici de montée, mais de descente : prévenance de Dieu, toujours en quête de l’homme, au point de venir habiter avec lui.

Avec ces remarques, nous revenons à notre point de départ. Le ciel du voyant de l’Apocalypse, ciel de la gloire divine, ciel des secrets révélés, est celui des prophètes ; la Jérusalem nouvelle de la fin des temps est aussi celle qu’avaient annoncée et décrite les prophètes. Dans les deux cas, le voyant exprime sa foi et son espérance chrétienne à l’aide de l’imagerie biblique. Sa vision y est chaque fois lecture et lecture inspirée, parce que le Christ a ôté les sceaux du Livre (la Bible) et révélé son secret.