Sur Jean 3, 16-18
« Au sein de la tranquille Trinité »
Sainte Elisabeth de la Trinité
Christus, n° 124, p 509-510

En Dieu, mon âme est silencieuse, c’est de Lui que j’attends ma délivrance. Oui, il est le rocher où je trouve le salut, ma citadelle, et je ne serai pas ébranlée.
Voilà le mystère que chante aujourd’hui ma lyre. Comme Zachée, mon Maître m’a dit : « Hâte-toi de descendre » – « Mais où ? ». Au plus profond de moi-même, après m’être quittée moi-même, séparée de moi-même, dépouillée de moi-même ; en un mot, sans moi-même.
« Il faut que je loge chez toi ». C’est mon Maître qui m’exprime ce désir, mon Maître qui veut habiter en moi avec le Père et son Esprit d’amour, pour que, selon l’expression du disciple bien-aimé, j’ai « société » avec eux. Vous n’êtes plus des hôtes ou des étrangers, vous êtes déjà de la maison de Dieu, dit saint Paul.
Voici comment j’entends être de la maison de Dieu : c’est en vivant au sein de la tranquille Trinité, en mon abîme intérieur, en cette forteresse inexpugnable du saint recueillement dont parle saint Jean de la Croix.
David chantait : Mon âme tombe en défaillance en entrant dans les parvis du Seigneur. Il semble que ce doit être l’attitude de toute âme qui rentre dans ses parvis intérieurs pour y contempler son Dieu, pour y prendre fortement son contact. Elle tombe en défaillance, dans un divin évanouissement, en face de cet Amour tout-puissant, de cette majesté infinie qui demeure en elle. Ce n’est point la vie qui l’abandonne, mais c’est elle qui méprise cette vie naturelle et qui s’en retire, car elle sent qu’elle n’est pas digne de son essence si riche, et elle s’en va mourir et s’écrouler en son Dieu !
Quelle est belle, cette créature dépouillée, délivrée d’elle-même ! Elle est en état de « disposer des ascensions en son cœur, pour passer de la vallée des larmes vers le lieu qui est son but », ce lieu spacieux chanté par le psalmiste qui est, me semble-t-il, l’insondable Trinité.
Elle monte, elle s’élève au-dessus des sens, de la nature ; elle se dépasse elle-même ; elle surpasse toute joie comme toute douleur, et passe à travers tout pour ne se reposer que lorsqu’elle aura pénétré en l’intérieur de Celui qui ‘elle aime et qui lui donnera lui-même « le repos de l’abîme spacieux » chanté par le psalmiste qui est, me semble-t-il, l’insondable Trinité. Et tout cela sans être sortie de la sainte forteresse ; le Maître lui a dit : « Hâte-toi de descendre ».
C’est encore sans sortir de là qu’elle vivra à l’image de la Trinité immuable en un éternel présent, l’adorant toujours à cause d’Elle-même, et devenant un regard toujours plus simple, plus unitif, « la splendeur de sa gloire », autrement dit : l’incessante louange de gloire de ses perfections adorables.