Sur Osée 9, 1-14

L’histoire du passé et les épreuves du prophète

Père Jean Steinmann

Le prophétisme biblique des origines à Osée, p. 201s

 

Ils n’habiteront plus la terre promise, Ephraïm reviendra en Egypte. Pour la première fois, le prophète Osée menace le peuple d’un retour en Egypte. Il est fort possible que la mention d’Assur, où ils mangeront des mets impurs, soit postérieure. Le prophète pense surtout à un retour en arrière. Le peuple ira en Egypte parce que c’est de ce pays qu’il est sorti au temps de Moïse. L’histoire marchera à reculons ; on retrouvera des conditions de vies antérieures à l’occupation de Canaan. Osée allait d’ailleurs jeter un regard insistant sur le passé du peuple pour y jeter l’explication de sa situation présente.

En général, les prophètes sont peu tentés de jeter un regard en arrière, d’exposer l’histoire du peuple de Dieu : la parole de Dieu concerne le présent. Mais la vie actuelle d’un peuple ne s’explique bien que par son passé. Il n’est donc pas très étonnant qu’Osée ait fait porter sa réflexion sur quelques grandes figures de l’histoire d’Israël. La geste patriarcale était déjà écrite de son temps ; mais Osée en donne une version fragmentaire et toute personnelle. Il n’éprouve aucune sympathie pour Jacob, héros éponyme du royaume, fondateur révéré des hauts lieux de Béthel et de Sichem.

L’allusion aux événements racontés dans le livre des Nombres (25,1-9), est claire : le peuple s’est alors livré à l’idolâtrie et à la débauche avec les filles de Moab. Il en a été terriblement châtié par Moïse qui fit empaler les chefs du peuple, traitement qui va de nouveau être appliqué à Samarie adoratrice de l’Infâme. Que tous ces maux reviennent aujourd’hui, dus à la sédentarisation, Osée n’en doute pas et il s’en prend nommément à Canaan.

Comme Amos, et plus tard Jérémie, Osée a dû ressentir les effets de l’hostilité de peuple, fût-ce par le cri de : Au fou ! Au lieu de s’en indigner, il fait répondre par Dieu que c’est vrai ! L’inspiré délire devant l’étendue de ces châtiments. On essaie de tuer ce prophète de malheur, on lui dresse des pièges jusque dans le temple de Dieu qui le fait parler, on le jette à la fosse comme le fut le visionnaire Joseph avant d’être vendu par ses frères, et comme le sera Jérémie ; on agit comme les Benjaminites de Gibéa qui violèrent la femme du Lévite.

On ignore quelles persécutions subit le prophète Osée, mais on comprend que ses violents réquisitoires aient suscités des réactions. Hélas pour Samarie ! Les faits allaient lui donner cruellement raison. Les malheurs prédits par Amos étaient sur le point de s’accomplir. Une guerre qu’on espérait victorieuse et rapide déclencherait la série des catastrophes et des ruines.