Sur Habaquq 2, 5-20

Malheur à celui qui dévaste la terre entière !

Saint Jérôme

Commentaire du prophète Habaquq, Livre 1er, chapitre 2

 

Le roi de Babylone sera pris au piège de son orgueil, tel l’ivrogne trompé par le vin. Comme la mort et comme l’enfer, il est insatiable de cadavres ; soumettant à sa domination toutes les nations et tous les peuples, il n’a pas trouvé de limites à son avidité. Lorsqu’il aura été enivré par la coupe du Seigneur, lorsqu’il se sera assoupi sous l’effet d’un vin sans mélange, est-ce qu’il ne deviendra pas pour tous un sujet de fable et de satire ?

Malheur à celui qui dévaste la terre entière et n’est pas rassasié de ses rapines ! Il ne cesse de spolier ceux qui sont déjà nus ; le seul but de sa violence est de dévorer, et, sous le poids de ses injustices et de ses pillages, il s’affaisse comme sous un collier trop lourd. Les Mèdes et les Perses ne vont-ils pas se dresser soudain pour détruire l’empire de Babylone ? D’abord pour le mordre, puis pour le mettre en pièce ? Nabucodonosor deviendra leur proie, et le dévastateur du monde entier sera pillé par le petit reste des peuples qui auront pu échapper à sa puissance et à sa cruauté. Tout cela lui arrivera à cause du sang humain qu’il a versé, le sang de Juda, et à cause de la violence faite au pays, à Israël, et à la cité de Jérusalem et à ses habitants.

Il est hors de doute qu’au sens littéral le prophète vise ici Nabucodonosor. Il prédit son malheur parce ce qu’il construit Babylone dans le sang et qu’il édifie ses remparts sur les carnages et les massacres. Qu’il écoute donc les menaces du Seigneur : Les peuples peineront pour du feu, et les nations travailleront pour le néant. Oui, lorsque Babylone sera incendiée, c’est en vain que ses peuples auront peiné, c’est pour rien qu’ils se seront donné du mal, et le peuple des Chaldéens périra, car la terre sera remplie de la connaissance de la gloire du Seigneur. Oui, lorsque Babylone aura été renversée, la puissance de la gloire de Dieu se fera connaître à tous, comme l’eau comble la mer. Voilà pour le sens littéral. Si nous voulons comprendre ce passage au sens spirituel, il est évident que le diable et l’Antéchrist édifient leur cité, leur église, dans le sang, par la perte de ceux qu’ils auront trompés ; ils fondent leur ville sur l’injustice en proférant contre Dieu l’impiété et en exaltant bien haut leur langue.

Une telle œuvre ne vient certes pas du Seigneur Sabaoth. Beaucoup de peuples périront et des nations innombrables seront entraînées dans leurs erreurs ; pourtant, s’ils reviennent de leur premier chemin et font pénitence, s’ils délaissent leur première route, la terre entière sera remplie de la gloire du Seigneur ; en effet, par la prédication des Apôtres, leur message se répandra dans le monde entier, comme les eaux comblent la mort.