Sur Jérémie 36, 1-10 . 21-32

Comment le Seigneur éduque

 

Origène

Homélies sur Jérémie, SC 238, Homélie XX, 1, p. 251s

 

 Tout ce que l’Ecriture dit de Dieu, même quand c’est invraisemblable en soi, nous devons pourtant penser que c’est digne d’un Dieu bon. Qui, en effet, ne trouvera pas invraisemblable que Dieu ait de la colère, qu’il se laisse aller au courroux, qu’il se repente, voire même qu’il ait sommeil ? Mais si on sait comprendre ces paroles ténébreuses, on trouvera chacune de ces expressions digne de Dieu, car sa colère n’est pas sans porter du fruit.

De même que sa parole éduque, sa colère éduque : ceux qui n’ont pas été éduqués par la parole, Dieu les éduque par la colère ; aussi se sert-il nécessairement de ce qu’on appelle sa colère, comme il se sert de ce qu’on appelle sa parole. De fait, la parole de Dieu n’est pas de même sorte que la parole de nous tous : de personne, en effet, la parole n’est un Vivant, de personne la parole n’est Dieu ; la parole d’aucun d’entre nous n’était au commencement auprès de celui dont elle est la Parole.

Ainsi la colère de Dieu est une colère qui ne ressemble à la colère de personne d’autre. Tout comme la Parole de Dieu a quelque chose d’étrange par rapport à la parole de n’importe qui, ainsi ce qu’on nomme sa colère, du moment qu’on l’attribue à Dieu, a quelque chose d’étrange et de différent de la colère de quelqu’un qui se met en colère. Ainsi encore son courroux a quelque chose de particulier, c’est un courroux délibéré qui traduit, chez celui qui fait des reproches avec courroux, le désir de convertir par ces reproches celui à qui il les adresse. La parole aussi fait des reproches, comme la parole éduque, mais la parole ne fait pas des reproches de la même manière que le courroux en fait ! ce sont en effet les gens qui n’ont pas tirés profit des reproches de la parole qui auront besoin des reproches du courroux.

De même que la Parole de Dieu a quelque chose d’exceptionnel, que sa colère a quelque chose d’exceptionnel, que son courroux a quelque chose d’exceptionnel, rien de tout cela n’offre de parenté avec ce qui porte le même nom au niveau humain. Chez tous, le courroux est une chose mauvaise, celui de Dieu est propre à convaincre ; chez tous la colère est chose pénible, celle que l’on attribue à Dieu est éducatrice ; il faut penser la même chose du repentir : celui qui le peut cherchera ce que fait le repentir de Dieu.