Sur Ezéchiel 40,1-4 . 43,1-12

La « Tora » d’Ezéchiel

 

Père Paul Auvray

Ezéchiel, p. 124s

 

Dès le début de la lecture de ce jour, la mise en scène rappelle celle de la vision des péchés de Jérusalem où Dieu dévoilait au prophète les abominations qui se commettaient à Jérusalem et qui ont provoqué la ruine de la cité. Mais à mesure que l’on avance dans la lecture de cette longue description, on s’aperçoit qu’il y a quelque chose de changé : Dieu lui recommande de regarder et d’écouter avec soin, d’appliquer son attention à ce qui lui est montré. Le prophète fera donc preuve désormais d’un souci d’exactitude et de précision jusqu’alors inconnu. Ezéchiel examine très exactement l’édifice que Dieu lui présente. Son guide le conduit dans tous les recoins, en mesure sous ses yeux tous les éléments, lui montre les vastes dépendances destinées aux services annexes du culte et au logement des ministres.

Ainsi se poursuit, pendant des pages, la lente et laborieuse exploration du vaste temple reconstruit à neuf. Si le prophète s’arrête à ces détails, c’est qu’il traite d’un édifice sacré sur les ruines duquel la pensée des exilés fidèles reste douloureusement fixée. Il ne prend tant de peine à décrire les dimensions de la demeure où Dieu, de nouveau, habitera parmi son peuple, que parce qu’il y voit le symbole magnifique d’un culte radicalement réformé, et d’une vie religieuse à jamais fervente en Israël. Témoignage un peu lourd sans doute, mais combien significatif de l’attachement d’un prophète à la maison de Dieu, de la nostalgie d’un exilé pour le lieu où son Dieu habita parmi les siens.

Mais en même temps qu’elle révèle la vénération du prophète pour le Temple de Jérusalem, cette vision témoigne de ses préoccupations et de ses expériences. En tant que prêtre de Jérusalem, Ezéchiel a le souci de l’honneur du sanctuaire et de la décence du culte. Or, tout au long de son ministère, il a vu le temple envahi par l’idolâtrie, la superstition, les cultes étrangers. Il faut désormais éviter de pareils dangers. C’est pourquoi le futur temple sera absolument indépendant, isolé sur une montagne ; pour Ezéchiel, le temple de Jérusalem sera un lieu séparé, difficile d’accès.

L’influence d’Ezéchiel lui survécut : nous en saisissons des traces jusqu’à l’époque de Jésus et jusque dans le judaïsme postérieur. Elle entretint, pendant des siècles, le rêve d’une communauté idéale qui, par son rigoureux souci de pureté, mériterait l’éternelle présence de Dieu.