Cantiques des cantique 2,8-14 et 8,6-7

Le voyage de Marie vers les montagnes de Juda

Saint François de Sales

In Renée Zeller, Florilège de Notre Dame, p. 24s

       Ce ne fut point la curiosité, ni la grossesse d’Elisabeth qui fit entreprendre à Marie ce voyage vers les montagnes de Juda, mais de bien plus belles, plus saintes et très agréables considérations dont je vais vous entretenir dans cette exhortation.

       Premièrement, Marie fut poussée à entreprendre ce voyage par un motif de charité, afin d’aller servir, secourir et soulager Elisabeth, sa cousine, en sa grossesse, et aussi pour voir cette grande merveille et se réjouir avec elle de la grâce que Dieu lui avait faite : lui donner un fils en sa stérilité, la faire concevoir en sa vieillesse, d’autant qu’elle savait bien que c’était alors une chose blâmable que d’être inféconde.

       Secondement, Marie la visita pour lui révéler ce très haut et très incomparable mystère de l’Incarnation qui s’était accompli en elle par l’opération du Saint-Esprit ; elle savait fort bien que sa cousine Elisabeth était une personne juste, bonne, craignant Dieu, et qu’elle désirait grandement la venue du Messie, promis pour venir racheter le monde, et que le temps désiré par les Patriarches et prédit par les Prophètes était advenu.

       Troisièmement, elle y alla pour redonner, par l’entremise de son Fils, la parole à Zacharie, lequel l’avait perdue par son incrédulité, n’ayant pas voulu croire ce que l’ange lui avait dit lorsqu’il lui avait annonçait que sa femme concevrait, en sa vieillesse, un fils qui se nommerait Jean.

       Quatrièmement, Marie savait que cette visite apporterait de nombreuses bénédictions à la maison de Zacharie, lesquelles retomberaient jusqu’à l’enfant qu’attendait Elisabeth, enfant qui serait sanctifié par sa visite.

        Ces raisons, et bien d’autres que je pourrais rapporter, montrent assez que Notre Dame, Notre glorieuse Maîtresse, n’entreprit ce voyage que par un secret désir de Dieu qui voulait, par cette visite, donner le commencement du salut des âmes en sanctifiant l’enfant qu’Elisabeth attendait.