2 Corinthiens 10,1 – 13,6

Rendre grâce

Didier Dastarac

Prier 15 jours avec Jeanne d’Arc, p. 95s

       On pouvait imaginer qu’au lendemain de la victoire d’Orléans, Jeanne organise une procession d’action de grâce. Le récit de son confesseur, Jean Pasquerel, insiste, au-delà de l’évènement d’Orléans, sur la régularité des prières quotidiennes de Jeanne, soit prière personnelle, soit prière collective. La confession qu’elle impose comme à autrui manifeste son souci de se mettre en état d’être entendue par Dieu dans la prière, même si c’est pour lui rendre grâce. Pas d’action entreprise si elle ne puise sa source dans la prière, ou si elle ne nous y reconduit pas. La prière est source et prolongement de l’action.  

Ceux qui ont pu suivre au quotidien Jeanne dans sa mission, dans sa réussite et dans ses échecs, ont pu constater que tous les instants de sa vie sont vécus comme un témoignage d’amour pour tout homme, même pour ses ennemis. Jeanne est prête à donner sa vie pour l’autre, par amour pour l’autre, et pour suivre Jésus : Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime. Cette capacité radicale d’aimer, elle en reconnaît la source, mais elle n’est pas comprise : ce n’est pas sur l’amour qu’elle est jugée lors de son procès de foi. L’objet inique et inavoué de ce procès n’est pas la recherche de la vérité, l’authenticité de la foi de Jeanne, c’est la justification de la soumission des juges aux exigences anglaises.

Commet trouver la force de rendre grâce en pareilles circonstances ? Dès le début de sa mission, Jeanne a accepté que le plan de Dieu déborde ses propres capacités et sa vie même. Cet abandon total à la volonté divine est la façon la plus achevée de rendre grâce à Dieu. La lecture attentive des deux procès, de condamnation et de réhabilitation, permet de faire un constat devant tant d’injustices : Jeanne, par sa foi et son don de soi, a touché quelques-uns de ses juges ecclésiastiques, comme le sieur de La Fontaines qui, à compter du 27 mars 1431, a préféré se retirer et quitter le tribunal. Il faudra attendre son martyre pour que le retournement de bien d’autres se produise. Tel est le cheminement, très solitaire finalement, de Jeanne qui, dans l’action de grâce, va jusqu’à l’offrande d’elle-même, par amour.