Jean 19, 31-37

L’eau et le sang

Saint Augustin

Homélie 120 sur l’évangile de saint Jean, OC 10, p. 416s

        Des soldats vinrent donc et rompirent les jambes de ceux qui avaient été crucifiés avec Jésus. S’approchant de Jésus, ils virent qu’il était déjà mort. Ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais l’un des soldats lui ouvrit le côté de sa lance, et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau. L’Evangéliste a choisi à dessein cette dernière expression : il n’a pas dit : un des soldats le frappa, ou le blessa, ou une autre expression de ce type ; il dit un des soldats lui ouvrit le côté, pour nous apprendre qu’il ouvrait d’une certaine manière la porte de la vie. De là coulèrent les sacrements de l’Eglise sans lesquels on n’accède pas à la vie qui est la vie véritable. Ce sang a été versé pour la rémission des péchés. Cette eau se mêle à la boisson salutaire ; elle est un bain qui purifie et une boisson rafraîchissante.

       Nous trouvons une préfiguration de ce mystère dans l’ordre qui fut donné à Noé d’ouvrir, sur un des côtés de l’arche, une porte par laquelle puisse entrer les animaux qui ne devaient pas périr dans le Déluge et qui représentaient l’Eglise.

       C’est en vue de ce même mystère que la première femme fut faite du côté d’Adam endormi, et qu’elle fut appelée vie et mère des vivants. Elle était figure d’un grand bien avant d’être le signe du grand mal de la prévarication. Ici, le second Adam ayant incliné la tête s’est endormi sur la croix afin que son épouse soit formée à partir de ce qui coulait de son côté. Ô mort, pour les principes de la vie ! Quoi de plus pur que ce sang ? Quoi de plus salutaire que cette blessure ?

       Et celui qui l’a vu rend témoignage et son témoignage est véridique. L’évangéliste rend deux témoignages tirés de l’Ecriture. D’abord, le fait que les soldats ne lui brisèrent pas un os, commandement qui s’applique à l’immolation de l’Agneau au cours de la célébration de la Pâque, d’où la phrase Le Christ notre Pâque a été immolé. De Lui, le prophète Isaïe avait prédit : Il sera conduit comme un agneau à l’immolation. Ensuite, l’évangéliste a ajouté qu’un des soldats de sa lance lui perça le côté, c’est à cela qu’a trait le deuxième témoignage : Ils verront celui qu’ils ont transpercé, dans lequel avait été prédite la venue du Christ dans cette chair qui pendit sur la croix.