Galates 2,11 – 3,14

Le conflit d’Antioche

Tertullien

Traité de la prescription contre les hérétiques, OC, p. 650s

        Les hérétiques objectent, pour incriminer l’ignorance des Apôtres, que Pierre et tous ceux qui l’accompagnaient furent repris par Paul, « tant il est vrai, disent-ils, qu’il leur a manqué quelque chose ». Et ils en concluent qu’une science plus complète pouvait leur venir encore, telle que Paul l’eut en effet quand il critiqua ses prédécesseurs dans l’apostolat. Nous pourrions répondre à ces gens qui rejettent les Actes des Apôtres : « Montrez-moi d’abord quel est ce Paul, ce qu’il était avant son apostolat, et comment il y est parvenu, d’autant plus que vous vous prévalez de son autorité pour bien d’autres choses. Que Paul atteste que de persécuteur il est devenu apôtre, cela ne suffit point pour quiconque ne croit qu’après un mur examen. Le Seigneur lui-même n’a point porté témoignage sur soi.

       Soit ! Mais qu’ils croient sans les Ecritures pour croire contre les Ecritures ! Au moins qu’ils nous montrent d’après ce blâme de Pierre par Paul, dont ils font état, que Paul ajouta un nouvel évangile à celui que Pierre et tous les autres avaient déjà annoncé. La vérité, c’est que, devenu de persécuteur prédicateur, Paul est présenté aux frères comme l’un d’entre eux, par les frères mêmes qui avaient reçu la doctrine et la foi des Apôtres. Ensuite, il  va à Jérusalem, ainsi qu’il le raconte lui-même pour voir Pierre : c’était à la fois son droit et son devoir, comme collègue de Pierre dans le ministère  de la prédication du même évangile.

       Les fidèles sans doute n’auraient pas vu avec tant d’étonnement le persécuteur devenu prédicateur, s’il avait prêché un évangile contraire au leur ; ils n’auraient pas non plus glorifié Dieu de ce que leur ennemi Paul était venu parmi eux ; ils ne lui auraient pas donné la main en signe d’amitié, d’union et de conformité de sentiments : s’ils partagèrent les fonctions du ministère entre Pierre et Paul, ce n’était pas que les deux apôtres dussent prêcher deux Evangiles différents, mais pour qu’ils prêchassent le même à différents peuples, Pierre aux Juifs, Paul aux Gentils. Au reste, si Pierre a été repris par Paul de ce qu’après avoir vécu avec les Gentils, il s’en séparait par respect humain, c’était une faute de conduite et non pas une erreur dans l’enseignement de la foi : aussi n’annonçait-il pas un autre Dieu que le Créateur, un autre Christ que le Fils de Marie, une autre espérance que la Résurrection.