Siracide 2, 1-18

« Montre-toi patient »

Saint Augustin

Le livre de la patience, OC 22, p. 178s

 

       Dans les vicissitudes de ta pauvre condition, montre-toi patient, vient de nous dire le Siracide. Par quel moyen peut-on acquérir la véritable patience ? Il y a des hommes qui l’attribuent aux seules forces de la volonté humaine, force qu’ils tiennent, disent-ils, du libre arbitre et non de la grâce de Dieu. C’est une erreur qui leur est inspirée par l’orgueil, c’est l’erreur de ceux qui se croient riches, et dont parle le psalmiste : Ce n’est point là la patience des pauvres, cette patience qui ne saurait périr, et qu’ils reçoivent de celui qui est riche, et auquel le psalmiste dit : Tu es mon Dieu, tu n’as pas besoin de mes biens ; c’est de lui seul que nous vient tout bien excellent et tout don parfait. C’est vers lui que s’élèvent les cris de l’indigent et du pauvre qui louent son nom, en demandant, en cherchant, en frappant, et en disant : Mon Dieu, tire-moi des mains du pécheur, de celui qui viole ta loi et de l’impie, car, Seigneur, c’est toi qui es ma patience et mon espérance depuis mes plus tendres années.

       Pour ceux qui sont riches à leurs propres yeux, et qui ne croient pas avoir besoin du Seigneur, loin de recevoir de lui la vertu de la vraie patience, mais se glorifiant de celle qui est en eux et qui n’a rien de véritable, ils méprisent la sagesse du pauvre qui met son espérance dans le Seigneur. Ils oublient qu’ils sont hommes, et qu’en attribuant tant de pouvoir à leur volonté, c’est-à-dire à la volonté humaine, ils encourent la malédiction du prophète qui s’écrie : Maudit celui qui met son espérance dans l’homme. C’est pourquoi, s’il leur arrive de supporter quelque maux, soit pour ne pas déplaire aux hommes, soit pour s’éviter des peines plus grandes, soit pour se plaire à eux-mêmes en attribuant, par une folle présomption, leur patience aux seules forces de leur orgueilleuse volonté ; on peut dire de leur prétendue patience, ce que le bienheureux apôtre saint Jacques dit de la fausse sagesse : Ce n’est point là la sagesse qui vient d’en-haut, mais la sagesse terrestre animale qui vient du démon. Pourquoi, en effet, les orgueilleux n’auraient-ils point une fausse patience, comme ils ont une fausse sagesse ? Celui qui donne la vraie sagesse est aussi celui qui donne la vraie patience ; et c’est à lui que le pauvre d’esprit dit : Mon âme est soumise à Dieu, car c’est de Lui que vient ma patience.