1 Pierre 2,1-17 ou Apocalypse 21,9-27

L’honneur du culte

Vie anonyme de saint Hugues

L’esprit de Cluny, p. 71s

       Encouragé par l’avertissement divin, Hugues construisit, comme une tente pour la gloire de Dieu, une basilique si grande et si belle qu’on pourrait difficilement en citer une autre plus vaste et plus admirable. Celle-ci est d’une telle splendeur, d’une telle gloire, que si, par hypothèse, les habitants du ciel pouvaient se plaire dans nos demeures humaines, on dirait que c’est ici le parvis des anges.

       Considérant que les œuvres corporelles ne servent pas à grand-chose tandis que la piété est utile à tout, il veillait scrupuleusement à la perfection du culte divin, et n’avait pas son pareil pour la conscience avec laquelle il s’acquittait du devoir de la louange. Dans les divins offices, on le trouvait sacré, solennel. Il célébrait avec une telle dignité, une telle grandeur, que c’était un spectacle pour les anges et les hommes. On aurait dit qu’il attirait à lui tous les cœurs pour les entraîner avec lui dans l’hommage à son Dieu. Au-dessus de tout bien sur cette terre d’exil, il pensait que c’était le bien suprême de glorifier Dieu par un culte solennel dans son sanctuaire.

       Un saint amour du sacrement de l’autel couronnait toutes ses vertus. L’élan de son cœur l’emportait au-dessus de lui-même pour le faire pénétrer à l’intérieur du Ciel. Qui pourrait décrire le regard si clair de sa foi ? Ne disons pas qu’il adorait le Seigneur Jésus caché sous le voile du sacrement, mais plutôt qu’il le contemplait sans voile. L’apparence extérieure ne portait aucune ombre dans son intelligence, mais l’œil de son esprit discernait le Seigneur. Avec les Apôtres, il le voyait marchant sur les chemins, avec Notre-Dame il le contemplait suspendu en croix et, avec Marie-Madeleine, se relevant d’entre les morts. Il avait mis toute son espérance dans ce mystère du Corps et du Sang sacré du Christ. Chaque jour, en son église, sacrifiant le Fils de Dieu à son Père pour ses péchés et ceux du monde entier, il s’immolait lui aussi dans la même oblation, avec une grande dévotion du cœur et avec des larmes. Vous l’auriez vu, à l’autel, pleurer jusqu’à en être secoué tout entier. Les sanglots lui coupaient la parole et le souffle. On comprenait qu’il devenait étranger à cette terre et se soulevait jusqu’au divin. Non seulement par l’esprit, mais dans son corps même, il appartenait au Ciel. On se prenait à penser que le Seigneur avait dit exprès pour lui : Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui. Et celui qui me mange vit lui aussi pour moi.