Daniel 9, 1-4 + 18-27

L’explication par Gabriel de la prophétie

Père Marie-Joseph Lagrange

La prophétie des soixante-dix semaines de Daniel, RB 1930, p. 481s

       La prophétie des Semaines est une instruction de l’ange Gabriel au prophète Daniel, en réponse à son ardent appel à la miséricorde de Dieu en faveur d’Israël et de Jérusalem.

       La méditation de Daniel portait sur la prophétie des soixante-dix années que l’on trouve chez le prophète Jérémie : les soixante-dix années se terminaient au châtiment des Babyloniens, lors du retour des captifs. Cette prophétie est regardée comme accomplie lorsque Cyrus ordonna de bâtir un temple au dieu du ciel, à Jérusalem : Je réaliserai à votre sujet ma bonne parole, pour vous ramener en ce lieu.

       La prière de Daniel demandait une réalisation parfaite de cet oracle qui devait s’accomplir sur les ruines de Jérusalem, et donc aboutir à une glorieuse restauration. Et lorsque l’ange explique comment la prière est exaucée, il dit qu’une parole est sortie, une parole divine, sur son peuple et sur sa ville sainte. Cette parole sortie, quelle est la promesse de l’ange Gabriel ?

       Il s’agit de semaines d’années ; elles sont comme détachées dans le bloc du temps, après quoi on verra apparaître l’œuvre de Dieu, c’est-à-dire une nouvelle ère. Dans ce verset, nous avons comme un crescendo sur le même rythme. C’est le même grand acteur qui agit et dans le même dessein. Dès le début, Dieu entre en scène, d’abord pour barrer la route à la grande prévarication, puis pour sceller les péchés comme dans une caisse d’où ils ne pourront plus sortir, et enfin pour pardonner.

       Après ces trois actes divins qui sont en quelque sorte négatifs, mais dans une manifestation ascendante de puissance et de bonté, viennent les traits positifs de l’intervention divine. D’abord la justice remplacera le péché, puis la vision sera scellée, c’est-à-dire reconnue divine. Le prophète qui a été favorisé de la vision est nommé lui aussi, car c’est lui qui a affirmé que la vision était de Dieu : son témoignage est ainsi confirmé, comme on le voit clairement en saint Jean lorsqu’il parle de l’envoyé de Dieu. Il s’agit donc bien d’une époque absolument nouvelle qui sera la réalisation de l’antique prophétie qui a retenti en Israël.

       Enfin vient le dernier et suprême trait, l’onction d’une sainteté des saintetés. Qui reçoit cette onction ? Rien dans ce passage ne désigne une personne ; le sens naturel est celui d’un sanctuaire de Dieu qui lui sera consacré par l’onction. Et comme ces termes sont placés au sommet du crescendo, ils dépassent de beaucoup une simple reconstruction de l’autel, il s’agit désormais d’une reconstruction totale et entière du Temple.