Genèse 1, 11-24

Saul, Paul, en toute bonne conscience

Cardinal John-Henry Newman

Sermons paroissiaux, tome 2, L’Année Chrétienne, p. 97s

       Pourquoi Saul, le persécuteur, obtint-il miséricorde ? Il répond lui-même à cette question, réponse que nous pouvons recueillir en toute confiance : Il m’a été fait miséricorde, parce que j’agissais par ignorance, étranger à la foi. Et pourquoi a-t-il été rendu capable de prêcher l’Evangile ? Parce que le Christ l’a jugé fidèle. La raison est ici exprimée de manière encore plus claire que dans le cas d’Abraham, qui fut honoré de révélations particulières de Dieu et à qui fut promis un nom sur la terre, parce que Dieu l’avait distingué pour qu’il prescrive à ses fils et à sa maison après lui de garder la voie du Seigneur en accomplissant la justice et le droit. Saul a toujours été fidèle selon sa notion de la voie du Seigneur. Nul doute qu’il n’ait péché gravement et profondément en persécutant les disciples du Christ. S’il avait connu l’Ecriture Sainte, il ne l’aurait jamais fait : il aurait reconnu en Jésus le Sauveur promis, comme l’avaient fait dès le premier instant Siméon et Anne. Et il avait été élevé à l’école humaine, et prêtait plus d’attention aux écrits des hommes qu’à la parole de Dieu. Cependant, il y avait entre lui et les autres ennemis du Christ cette différence qu’il gardait une conscience pure et avait l’habitude d’obéir à Dieu selon ses lumières. Dieu nous parle de deux manières, dans nos cœurs et dans sa parole. De ces informateurs, Paul connaissait peu le second, le plus clair ; le premier il ne pouvait pas ne pas le connaître à sa mesure, car il était en lui, et il lui obéissait. Cette voix était faible, mêlée de sentiments humains et de traditions humaines, et assourdie par eux, de sorte que ce que sa conscience lui ordonnait n’était qu’en partie juste et pour le reste erroné. Malgré tout, croyant que cette voix lui disait la volonté de Dieu, il déférait à ses avis, agissant comme il le fit plus tard lorsqu’il n’avait pas été rebelle à la vision céleste qui lui apprit que Jésus était le Christ. Ecoutez comme il parle de lui-même : C’est en toute bonne conscience que je me suis conduit devant Dieu jusqu’à ce jour. J’ai suivi le parti le plus strict de notre religion. Quant à la justice que peut donner le Loi, un homme irréprochable.

       Qui n’a pas éprouvé la crainte d’errer en s’écartant de la véritable doctrine du Christ ? Que celui qui l’éprouve aime de tout son cœur la sainte lumière de la conscience au-dedans de lui et qu’il lui soit docile, comme le fut Saul, qu’il étudie soigneusement l’Ecriture, comme Paul ne le fit pas, et le Dieu qui a fait miséricorde même aux persécuteurs de ses saints, répandra assurément sa grâce sur lui et le fera pénétrer, comme Saul le fut, dans la vérité telle qu’elle se trouve en Jésus.