Luc 24, 13-35

Les disciples d’Emmaüs

Saint Augustin

Sermon 235, OC 18

        Frères, quand le Seigneur s’est-il fait reconnaître ? A la fraction du pain. En nous, il n’est point de trouble : nous rompons le pain et nous reconnaissons le Seigneur. Il ne s’est laissé reconnaître qu’ici, pour nous, nous qui ne devions le voir dans la chair, et qui, pourtant, devions manger sa chair. Ô toi, qui que tu sois, toi qui crois en Lui, toi qui ne portes pas en vain le nom de chrétien, toi qui n’entres pas au hasard dans l’Eglise, toi qui écoutes la Parole de Dieu dans la crainte et l’espérance, rassure-toi, en ce partage du pain. L’absence de Dieu n’est pas une absence. Aie foi, il est avec toi, quoique tu ne le voies pas. Les disciples, eux, quand le Seigneur les aborda, n’avaient pas la foi. Ils ne croyaient pas qu’il eût ressuscité, ils n’espéraient pas qu’on pût ressusciter. Ils avaient perdu la foi, ils avaient perdu l’espérance, ils marchaient morts avec un Vivant, ils marchaient morts avec la Vie. Avec eux marchait la Vie. Mais, en leur cœur, nulle vie n’était encore renée.

        Le Seigneur s’est fait reconnaître, et après cette reconnaissance, il a disparu pour toujours. Les disciples l’ont perdu de corps lorsqu’ils l’ont tenu avec la foi. Le Seigneur a quitté corporellement son Eglise, et il est monté au ciel afin que la foi se fortifie. Car si tu ne crois qu’en ce que tu vois, où est la foi ? Mais si tu crois sans le secours de tes yeux, quelle ne sera pas ta joie lorsque tu verras ! Fortifions notre foi, la vue nous sera rendue. Il viendra celui que nous ne voyons pas, il viendra, frères. Oui, il viendra. Prenez garde à la façon dont il nous surprendra. Car il viendra en ce jour dont parlent les hommes : Où ? Comment ? Quand sera-ce ? Quand viendra-t-il ? Sois-en sûr, il viendra. Non seulement il viendra, mais il viendra malgré toi. Malheur à ceux qui ne croient pas ! Pour eux, quel effroi ! Et quelle joie pour ceux qui auront cru ! Les fidèles se réjouiront, les infidèles seront confondus. Les fidèles diront : Grâces te soient rendues, Seigneur ! Nous avons écouté la vérité, nous l’avons crue, nous l’avons espéré, et nous la contemplons.