Isaïe 60, 1-22

A qui la naissance du Christ devait-elle être manifestée ?

Saint Thomas d’Aquin

Somme Théologique, Troisième partie, article 3, tome 4, p. 271s

         Le salut qui devait être réalisé par le Christ concernait toutes les catégories d’hommes parce que, dit saint Paul, dans le Christ Jésus il n’y a plus ni homme, ni femme, ni païen, ni juif, ni esclave, ni homme libre, et ainsi des autres différences et pour que cela soit préfiguré dans la naissance même du Christ, il a été manifesté à des hommes de toutes conditions. Parce que, dit saint Augustin, les bergers étaient des Israélites et les mages des païens. Les uns habitaient tout près, les autres venaient de loin. Les uns et les autres se rejoignirent en s’unissant à la pierre angulaire. Il y eut entre eux d’autres différences : les mages étaient sages et puissants, les bergers ignorants et grossiers. Il s’est aussi manifesté à des justes comme Syméon et Anne, et à des pécheurs comme les mages ; il s’est encore manifesté à des hommes et à des femmes, comme Anne, pour montrer que nulle condition humaine n’est exclue du salut du Christ.

        Celle manifestation de la naissance du Christ fut comme les prémices de la manifestation plénière qui se produirait plus tard. Et de même qu’à cette seconde manifestation la grâce du Christ fut annoncé par le Christ et ses Apôtres, d’abord aux Juifs et ensuite aux païens, du même les premiers à s’approcher du Christ furent les bergers qui étaient les prémices des Juifs comme étant ses voisins, et ensuite les mages qui venaient de loin, eux qui furent les prémices des nations, selon saint Augustin.

        Comme dit encore saint Augustin, si le manque de culture domine dans la rusticité des bergers, l’impiété domine dans les sacrilèges des mages. Et pourtant, celui qui était la pierre angulaire s’est adjoint les uns et les autres, car il venait choisir ce qui était ignorant pour confondre les sages, et appeler non les justes mais les pécheurs, afin qu’aucune grandeur ne pût s’enorgueillir, aucune faiblesse désespérer.

        Selon  saint Jean Chrysostome, les mages sont venus de l’Orient parce que la foi a commencé là où naît le jour, parce que la foi est la lumière des âmes. Ou bien, parce que tous ceux qui viennent au Christ viennent de lui et par lui, dont Zacharie nous dit : Voici un homme, Orient est son nom. On dit qu’ils sont venus de l’Orient, c’est-à-dire du fond de l’Orient pour certains, ou bien de régions proches de la Judée, mais à l’Orient de celle-ci. Et pour manifester la naissance du Christ, poursuit Jean Chrysostome, l’ange n’est pas allé à Jérusalem, et n’a pas appelé les scribes et les pharisiens, car ils étaient corrompus et dévorés d’envie. Mais les bergers étaient sincères, pratiquant l’ancien mode de vie des patriarches et de Moïse. De plus ces bergers préfiguraient les docteurs de l’Eglise, à qui sont révélés les mystères du Christ qui échappaient aux Juifs.