Genèse 21, 1-21

L’exemple d’Abraham

Saint Thomas d’Aquin

Commentaire de l’épître aux Romains, p. 186s

        Si Abraham avait été justifié par les œuvres de la Loi, il n’aurait pas sujet de se glorifier devant Dieu ! Donc il n’a pas été justifié par les œuvres. Il est manifeste, en effet, qu’Abraham n’a pas trouvé la justification par les œuvres de la Loi, en sorte que sa justice consistât dans ses œuvres, car, à la vérité, il aurait sujet de se glorifier devant les hommes qui voient les œuvres extérieures, mais pas devant Dieu qui voit dans le secret : L’homme voit ce qui paraît, mais Dieu regarde le cœur, peut-on lire dans le premier livre des Rois. L’apôtre Paul écrit dans sa première lettre aux Corinthiens : Que personne ne se glorifie dans les hommes, car vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu. Aussi est-il dit à l’encontre de certains : Ils aimèrent la gloire des hommes plus que la gloire de Dieu.

        L’apôtre Paul détruit cette logique, négative, en prouvant l’affirmation opposée, à savoir qu’Abraham avait sujet de se glorifier devant Dieu. J’affirme, dit-il, qu’Abraham a été justifié de telle sorte qu’il a sujet de se glorifier devant Dieu. Or, que nous dit l’Ecriture : Abraham crut à Dieu, lui promettant de multiplier sa postérité. Crois en Dieu, et il te viendra en aide, nous dit le Siracide. Et ce lui fut imputé, par Dieu, à justice. Abraham n’a-t-il pas été trouvé fidèle dans la tentation, et cela ne lui a-t-il pas été imputé à justice ? Ainsi il est évident que devant Dieu, qui lui a imputé à justice d’avoir cru, Abraham a sujet de se glorifier. Or il faut considérer que cette justice que Dieu lui impute, Abraham l’a montrée écrite, non dans quelque œuvre extérieure, mais dans la foi intérieure du cœur, que Dieu seul considère. Puisqu’on dit que triple est l’acte de foi, lequel consiste à croire Dieu, croire à Dieu, croire en Dieu, Abraham a posé celui de ses actes de foi qui consiste à croire à Dieu, ce qui est le propre de l’acte de foi : il en manifeste le caractère spécifique. Croire en Dieu manifeste l’ordre de la foi vers sa fin, qui s’obtient par la charité, car croire en Dieu, c’est aller vers Dieu en croyant, ce que réalise la charité.