Romains 7, 14-25

L’homme sous l’emprise de Dieu ou du péché

Saint Ambroise de Milan

Traité sur l’évangile de saint Luc VIII, 49-50, SC 52, p. 120s

 

          Comment l’apôtre Paul a dit qu’il existe en nous deux esprits : peut-être au sens que l’un appartient à l’homme extérieur qui se corrompt, l’autre à l’homme intérieur qui se renouvelle par les mystères. Le premier, le pire, s’élève d’une vaine enflure en l’esprit de sa chair et ne s’attache pas à la tête, Notre Seigneur Jésus le Christ, notre tête à tous, le Créateur de tous. L’autre, bien préférable, est celui qui aime l’humilité recherche la sagesse, n’oublie pas la miséricorde. C’est le bon semeur, car il a semé, donné aux pauvres ; sa justice demeure à jamais. L’un est donc spirituel, l’autre charnel. Si les paroles de l’apôtre nous font saisir que le séducteur qui s’exalte est rempli par l’esprit de la chair, elles nous montrent aussi que l’homme saint se renouvelle par l’esprit de l’âme : Renouvelez-vous dans l’esprit de votre âme. Il montre donc qu’il existe deux esprits, l’un qui devient l’esprit de la chair en succombant au péché, l’autre qui, unit à l’Esprit de Dieu, désavoue les souillures de la chair.

Il existe bien non seulement deux esprits, mais aussi deux lois en nous. L’une et l’autre nous ont été exposées par l’apôtre quand il a dit : Je prends plaisir à la loi de Dieu quant à l’homme intérieur, mais je vois une autre loi qui lutte contre la loi de mon esprit et m’emprisonne dans la loi du péché. Il existe donc une loi de l’homme intérieur, et il y en a une autre, celle de l’homme extérieur : la première interdit le péché, la seconde persuade de le commettre ; la première condamne l’erreur, la seconde la suggère ; la première arme l’esprit, la seconde le tente. D’après saint Paul, il existe donc en nous deux lois : la Loi de Dieu, et la loi du péché : Moi, je suis à la fois serviteur de la loi de Dieu par l’esprit, et dans ma chair, je suis serviteur de la loi du péché. Où l’on voit qu’il suffit de nommer l’esprit pour faire comprendre qu’il s’oppose à la chair. Lorsqu’en effet Paul dit qu’il est serviteur de la Loi de Dieu par l’esprit, il démontre implicitement que l’esprit en lui-même est bon, aussi longtemps qu’il n’est pas vaincu par la chair, et que notre nature a été créée pour résister à l’erreur. Donc, quand l’esprit est vaincu, il s’agit de l’esprit de la chair ; ce n’est pas la nature qui l’a fait tomber, c’est la chair. Vaincu, il devient la propriété de la chair qui l’a vaincu, et il prend son nom. Tandis que l’autre esprit, uni au souffle de Dieu, repousse les séductions de la chair.