Isaïe 50,4 – 51,1

Notre Rédempteur

Jean de Fécamp

Le livre des Méditations : la Passion, VS 70 (1944), p. 212s

 

          Père très clément, jette les yeux sur ton Fils qui a souffert pour moi une telle inclémence. Que la vue de sa souffrance, Père très bon, te fasse ressouvenir avec bienveillance de celui pour qui il souffre. N’est-ce pas, ô mon Seigneur, ce Fils innocent que tu as livré pour racheter ton serviteur ? N’est-il pas l’auteur de la vie, lui qui s’est laissé mener comme une brebis à la tuerie, lui qui s’est fait obéissant jusqu’à la mort et n’a pas craint de subir la mort la plus atroce ? Songe, ô Toi qui as disposé toute l’ordonnance du salut, que si sans doute tu l’as engendré de ta puissance, tu as néanmoins voulu le rendre aussi participant de ma faiblesse. Ce que tu aperçois là, c’est vraiment ta divinité qui, revêtue de ma nature, est montée sur le gibet de la croix, et qui a supporté, dans la chair qu’elle a assumé, un dur supplice. Seigneur mon Dieu, ramène le regard de ta majesté sur l‘œuvre de ton ineffable bonté. Considère le corps écartelé de ton Fils, vois couler de ses mains innocentes son sang sacré ; et ainsi apaisé, remets les crimes qu’ont accomplis mes mains. Contemple ce côté sans défense, férocement ouvert d’un coup de lance ; renouvelle-moi dans cette source sainte et sacrée que je vois couler de là. Vois, ces pieds immaculés qui n’ont jamais marché sur le chemin des égarés, mais qui ont toujours cheminé dans ta loi, les voici cruellement percés de clous ; affermis mes pas dans tes sentiers, fais par ta bonté que je prenne en haine toute route d’iniquité : que ta miséricorde m’en éloigne toujours, que ta faveur me fasse choisir la voie de la vérité. Je t’en prie, Roi des saints, par ce Saint des saints, par ce mien Rédempteur, fois-moi courir la voie de tes commandements  afin que je puisse être uni d’esprit à Celui qui n’a pas eu horreur de se revêtir de ma chair. Père, vois le supplice subi par le Rédempteur, remets les fautes de celui qu’il rachète. C’est Lui, Seigneur, que tu as frappé à cause de mes péchés et des péchés de ton peuple, Lui qui est cependant le Bien-Aimé en qui tu as mis tes complaisances. Il est cet Innocent en qui n’a pas été trouvé de fourberie et que cependant on a compté parmi les malfaiteurs.