Deutéronome 30, 1-20

Les deux voies, l’étroite et la large

Saint Augustin

Sermon 67, OC 20, p. 25s

 

          Je te propose la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Ces propos ont été repris par le Seigneur dans l’évangile en mentionnant deux voies, l’une qu’il faut redouter et fuir, l’autre qu’il faut rechercher et suivre. La première conduit les justes au ciel après de courtes fatigues, la seconde entraîne à l’enfer les amateurs du monde après de moins courtes joies. Entrez, nous dit le Seigneur, dans la voie étroite, car large est la porte et spacieuse la voie qui mène à la perdition. Dieu place sous les yeux du genre humain tout entier ce que nous devons expier, éviter, désirer ou fuir, craindre et aimer de tout notre cœur. Cela nous rappelle ce qu’il avait lui-même dit par la bouche du prophète : Devant l’homme sont la vie et la mort ; ce qui lui plaira davantage lui sera donné. Il avait dit encore : Vous avez en mains le feu et l’eau, la mort et la vie ; choisissez la vie si vous voulez vivre. Or tout ce que nous avons énuméré, c’est-à-dire le bien et le mal, est pleinement représenté par ces deux voies. Là nous sont proposés l’enfer et le royaume, le Christ et le diable, la hauteur et la profondeur. Par la grâce divine, chacun a le pouvoir d’aimer ce qu’il veut, et de saisir ce qu’il préfère.

          A la voie étroite et resserrée préside le Christ ; à la voie large et spacieuse le diable. L’un nous invite au royaume, l’autre nous entraîne à l’enfer ; l’un nous pousse en haut, l’autre nous précipite en bas. Le diable fait briller à nos yeux de trompeuses délices pour nous plonger dans de réelles amertumes ; le Christ nous invite à de rapides efforts pour nous faire acquérir une éternelle béatitude. Si nous n’ouvrons que les yeux du corps, nous sommes trompés par la voie large et spacieuse ; si nous examinons avec les yeux du cœur, nous trouvons la sécurité dans la voie étroite et rude.

          Avertissons-nous donc mutuellement, exhortons-nous sans cesse avec une pure charité à préférer cette voie étroite et rapide par laquelle nous mériterons d’arriver à l’ampleur du paradis ; à mépriser et détester de toutes nos forces, avec le secours divin, cette voie dont l’ampleur momentanée mène aux profondeurs de l’enfer ceux qu’elle a séduits.