Hébreux 6, 9-20

La promesse faite à Abraham : le salut des nations

Cardinal Jean Daniélou

Le mystère de l’Avent, p. 35s

 

          L’objet de la promesse faite à Abraham, paroles d’espérance et d’encouragement, c’est le mystère du salut des nations. Toutes les familles de la terre seront bénies en toi. Ce qui est extraordinaire ici, c’est que, dès ce premier commencement de l’histoire sainte, son terme lui est déjà présenté. Ce terme, c’est celui de la création toute entière, c’est-à-dire que toute la création spirituelle reconnaisse et glorifie la Trinité bienheureuse : Que ton règne vienne, c’est déjà lui qui est présenté à Abraham. Certes il se déploiera à travers une longue suite de siècles, à travers les grandes œuvres de Dieu dans la triple histoire d’Israël, de Jésus, de l’Eglise. Et cette triple histoire est déjà l’objet de la foi d’Abraham : il lui est demandé de croire qu’il sera le père d’une grande nation, alors que sa femme, Sara, est stérile ; que par sa descendance, c’est-à-dire par un de ses descendants, la bénédiction de Dieu s’étendra sur l’humanité, et c’est l’annonce que le Messie sera son descendant : Abraham a tressailli de joie parce qu’il devait voir mon jour, dira de lui Jésus ; enfin, que toutes les familles de la terre seront sauvées, et c’est l’édification de l’Eglise.

          Mais dès l’origine, ce qui est l’objet de la promesse et l’objet de la foi, c’est le salut des nations, c’est-à-dire le but de toute la mission. Ainsi l’attente d’Abraham est déjà le commencement de la nôtre. Et comme il a cru, seul dans un monde entièrement païen, au salut de toutes les nations, ainsi, persévérant dans sa foi, en dépits des apparences contraires, devons-nous continuer à attendre, en Eglise, le rassemblement de toutes les nations en celui qui a pris sa chair dans une fille d’Abraham.

          Nous comprenons dès lors pourquoi saint Paul, apôtre des nations, a si souvent montré dans sa mission l’accomplissement de la promesse faite à Abraham. C’est cette bonne nouvelle qu’Abraham a connue et dont, après les longs délais de la sagesse divine, Paul est le héraut. Cette évangélisation ne sera finalement accomplie qu’à la fin des temps, l’Ecriture nous l’enseigne : L’Evangile du Royaume sera d’abord prêché par toute la terre : alors viendra la fin. Le salut des nations est donc encore pour nous objet de foi et d’attente, comme pour Abraham ; ce salut des nations, c’est bien le mystère caché en Dieu dès avant la création du monde : rassembler toutes choses en Jésus le Christ.