1 Corinthiens 16, 1-24  

« Veillez, tenez-vous fermes dans la foi »

Bienheureux Guerric d’Igny

Sermons, tome II, SC 202, Quatrième sermon sur saint Benoît, p. 107s

 

          Lorsque la foi opère par la charité, alors la conscience de nos mérites nous rassure, et de la foi peut naître l’espérance ; alors la foi peut servir de base consistante, et, comme de fondation, à l’édifice des biens éternels qu’il nous est donné d’espérer. Sans une pareille foi, il est impossible de plaire à Dieu ; avec une pareille foi, il est impossible de déplaire à Dieu. Tes yeux regardent ma foi, disait celui qui se tenait constamment en présence de Dieu par la foi. Que tes yeux, Seigneur, regardent ma foi, c’est un retour dû à juste titre et en toute équité, puisque mes eux sont toujours fixés sur le Seigneur qui me dit avec confiance : Tu sais ce qu’est la foi.

Frères, si nous nous comportons comme des gens dépourvus de foi qui tournent le dos à Dieu, si nous fermons les yeux à la crainte de Dieu pour regarder plutôt des bagatelles, à quel titre pensons-nous qu’il doive nous regarder ? Ou plutôt, il nous regarde, mais avec quel visage ! Le visage de Dieu se tourne vers ceux qui font le mal, dit le psalmiste ; combien irrité, combien terrible, combien insoutenable, on le saura finalement lorsque s’enfuiront de devant sa face ceux qui le haïssent, nous dit encore le psalmiste. S’enfuyant de devant sa face, où fuiront-ils, Seigneur, sinon vers les ténèbres extérieures, vers ce chaos et cet abîme de feu et d’obscurité ? C’est alors, en effet, qu’ils diront aux montagnes : Tombez sur nous, et aux collines : Couvrez-vous, jugeant plus doux d’être absorbés par le gouffre de l‘enfer que de soutenir le regard irrité de Dieu.

          Par contre, c’est alors que les justes se tiendront en grande assurance ; c’est alors que la foi, qui pour l’instant se tient inquiète en la présence du Seigneur pour discerner sa volonté, s’y tiendra rassurée pour contempler sa gloire. Veillez, mes frères ; tenez fermes dans la foi. Lorsque la foi nous provoque à la crainte, on ne peut s’endormir par négligence ; lorsque la foi nous enracine dans l’espérance, on ne peut chanceler par défiance. Mais faites toutes vos actions dans la charité, de sorte que la douceur s’y joigne à la foi, afin que chacun dise de chacun d’entre vous : Dans sa foi et dans sa douceur, le Seigneur en a fait un saint. Que le Saint des saints en personne vous l’accorde, lui qui vit et règne dans les siècles des siècles, Amen.