Marc 4, 35-41

Le calme après la tempête

Saint Augustin

Sermon sur le psaume 54, 10, OC 12, p. 565s

 

          Tu es en mer, et c’est la tempête. Il ne te reste qu’à crier : Seigneur, je me noie ! Qu’il te tende la main celui qui, sans aucune crainte, marche sur la mer, qu’il te soulève tout tremblant, qu’il fixe en lui ta sécurité, qu’il parle en ton cœur, et qu’il te dise : Pense à ce que j’ai souffert pour toi. Peut-être as-tu à souffrir d’un mauvais frère, ou d’un ennemi extérieur. Pense à ce que j’ai supporté pour toi de la part de mes compatriotes juifs qui frémissaient de rage contre moi, et de la part de celui qui me trahissait.

La tempête fait rage, oui, mais Jésus sauve les siens de leur manque de courage, de leur manque d’audace. Ta barque est secouée, ballotée ? C’est qu’en toi, peut-être, Jésus dort. La mer était déchaînée, la barque où naviguaient les disciples était battue par les flots en furie, Jésus lui dormait. Ces hommes réalisèrent alors que le créateur, le dominateur des vents dormait au milieu d’eux ; affolés, ils s’approchèrent de lui, l’éveillèrent, et, au milieu de cette tempête, ils lui crièrent : Seigneur, nous sommes perdus, cela ne te fait rien ? Alors, réveillé, il interpelle les vents avec vivacité et dit à la mer : Silence, tais-toi. Le vent tomba et il se fit un grand calme.

C’est sans doute avec raison qu’il arrive que, parfois ton cœur se trouble. Pourquoi ? Parce que celui en qui tu dois avoir confiance est sorti de ta pensée, celui en qui tu crois, tu l’as oublié, tu ne penses plus à lui. Si le Christ ne se présente pas à ton esprit, c’est sans doute qu’il dort en toi ; n’est-ce toi aussi qui dors, toi qui l’as totalement occulté de tes pensées ? Car le Christ, lui, il est toujours en toi, prêt à se manifester à toi si tu lui fais signe. Qu’attends-tu pour l’éveiller, pour le réveiller : fais appel à ta foi. Si le Christ dort en toi, c’est que tu as oublié ce qu’il a fait pour toi, tu as oublié sa passion, tout ce qu’il a souffert pour toi. Si tu te souvenais davantage de ce qu’il a fait pour toi, le Christ veillerait en toi ; si tu voyais ce que le Christ a supporté pour toi, ne souffrirais-tu pas d’une âme égale ? Quand de telles pensées t’habitent, les vents sont tombés, la mer est calme, tu restes éveillé, alors le Seigneur est en toi, il te parle, tu l’entends, sa joie t’emplit le cœur.