Isaïe 9,7 – 10,4

Pourquoi toujours après coup ?

Saint John-Henry Newman

Sermons paroissiaux, tome IV, sermon 17, p. 225s

         

            Observons la conduite du Seigneur durant sa vie : nous verrons qu’il mettait un soin manifeste à voiler, en quelque sorte, la connaissance qu’il donnait de lui en plénitude. Il semble qu’il ait voulu qu’on pût un jour en jouir, mais jamais sur le moment. Comme s’il eût fallu que ses paroles existent déjà comme une déclaration faite au monde, alors qu’elles devaient encore attendre longtemps pour recevoir leur interprétation. C’est que le Christ les réservait, il faut bien le reconnaître, pour la venue de l’Esprit-Saint : lui devait mettre en pleine lumière et le Christ et ses Paroles : Lorsqu’il viendra l’Esprit de Vérité, il vous mènera à la Vérité toute entière ; Lui me glorifiera.

         En effet, lorsque l’Esprit fut descendu sur eux, les Apôtres ont compris qui avait été avec eux ; quand tout a été réalisé, alors seulement ils ont reconnu la Vérité, mais non sur le moment.

          C’est ici que nous saisissons le principe tout à fait général qu’il joue à maintes reprises dans l’Ecriture, comme dans la marche du monde : lorsque Dieu vient à nous, lorsqu’il intervient dans le monde, nous n’en discernons jamais la Présence au moment où elle est en nous, où elle agit au milieu de nous ; nous ne le réalisons qu’après coup, lorsque nous jetons un regard en arrière, en examinant ce qui s’est passé, ce qui est accompli… Ainsi Joseph fit-il confiance au Seigneur en son épreuve et put-il dire après coup à ses frères : C’est le Seigneur qui m’a envoyé avant vous pour vous sauver la vie… Ce n’est pas vous, c’est Dieu !

       Merveilleuse Providence ! Elle se fait tellement silencieuse tout en étant si efficace, si constante, et si infaillible ! Si irrésistible qu’elle déjoue le pouvoir même de Satan qui ne peut discerner la Main de Dieu dans le cours des choses… Ô Providence de Dieu, si discrète, si irrésistible ! Vraiment, Tu es un Dieu caché, Dieu d’Israël Sauveur !

       Oui, la Main de Dieu veille toujours sur les siens ; c’est lui qui les conduit…Qu’ils se laissent mener sans voir !