2 Chroniques 29,1-2 + 30,1-16a

Sur l’obéissance

Saint Jérôme

Douze homélies sur des sujets divers, SC 593, p. 201s

 

           Rien ne plaît pas à Dieu comme l’obéissance. Cham fut maudit, et de nombreux siècles après, cette parole demeure : Semence de Canaan et non de Juda, car il n’a pas obéi à son père. Mais Sem, qui a obéi à son père, a eu la bénédiction pour tous les siècles. C’est pourquoi, je dis ceci : ce n’est pas au fils de juger les pères. Personne ne va chez un maître pour donner un enseignement à son maître ! Tu es venu me trouver pour que je t’enseigne les lettres ; si j’écris quelque chose pour toi, et que je te dis : Ecris comme moi, assurément tu dois imiter celui que tu as choisi comme maître. Quelqu’un est-il savant ? Il va chez un maître plus compétent. Pourquoi dis-je tout cela ? Pour que nous fassions preuve d’obéissance envers nos pères. En effet, le Seigneur dit : Celui qui vous méprise me méprise.Donc celui qui méprise les apôtres méprise le Christ ; celui qui méprise ses pères méprise le Christ qui demeure chez ses pères. Je dis cela parce qu’ici, chez nous, la plus grande, l’unique vertu est celle d’obéissance. Si tu jeûnes et pries jour et nuit, si tu demeures dans le sac ou la cendre, si tu ne fais que ce qui est prescrit dans la loi, si tu es à tes yeux une sorte de sage, et que tu n’es pas obéissant à ton père, tu as gaspillé en pure perte toutes tes vertus. A elle seule, l’obéissance vaut plus que toutes les autres vertus. Le jeûne ou la continence, si tu ne fais pas bien attention, te donnent de l’orgueil. Or l’orgueil est l’ennemi de Dieu ; Dieu ne hait rien tant que l’orgueil. Quiconque n’obéit pas n’agit pas avec sainteté mais avec orgueil. Il n’obéit pas parce qu’il se pense meilleur que celui à qui i n’obéit pas.

           Je vous le dis simplement : Dieu a en horreur tous les péchés : le mensonge, le parjure, le vol, le brigandage, l’adultère, la fornication. Si quelqu’un était pris en flagrant délit de ces fautes, il ne pourrait lever les yeux, et nous le considérerions comme exécrable. Mais si quelqu’un est orgueilleux, il commet un péché bien pire que l’adultère ; et pourtant nous parlons avec lui. Mais avec l’orgueilleux, que faire ? Voyez quel mal est l’orgueil, puisqu’il n’a pas d’excuse. Si un frère lui donne un conseil, il ne daigne pas l’écouter parce qu’il pense avoir plus de sagesse que celui qui lui donne ce conseil. Et que dit-il en son cœur : Moi, je me trouve plus sage, donc je n’ai pas besoin de conseil. Et même s’il ne le dit pas, du fait qu’il méprise le conseil de son frère, il l’exprime dans son cœur.