2 Rois 15,1-5+32 – 16,8

Adorer et servir, sans partage

 Origène

Homélie 8 sur l’Exode, n° 4, SC 321, p. 255s

 

            L’Ecriture prescrit : Tu n’adoreras point les idoles, tu ne les serviras point. Une chose est servir, une autre adorer. On peut adorer parfois contre son gré, comme certains courtisans qui, voyant les rois livrés à une dévotion de ce genre, feignent d’adorer les idoles, bien qu’ils aient au cœur la certitude que l’idole n’est rien ; mais les servir, c’est les entourer d’une affection et d’une dévotion totales. La Parole divine interdit l’un et l’autre : on ne leur doit ni service cordial, ni adoration apparente. Sachons toutefois que la décision de garder ce qu’ordonne le précepte, de répudier tous les autres dieux et seigneurs et, hormis l’unique Dieu et Seigneur, de n’avoir personne pour dieu ou seigneur, c’est déclarer une guerre sans trêve à tous les autres.

             Quand donc nous venons à la grâce du baptême, renonçant à tous les autres dieux et seigneurs, nous confessons le seul Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit. Or, malgré cette confession, si nous n’aimons pas le Seigneur notre Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, et n’adhérons à lui de toute notre force, nous ne sommes pas devenus la part du Seigneur ; nous sommes comme placés à une sorte de frontière, subissant l’hostilité de ceux que nous fuyons, sans rendre propice le Seigneur près de qui nous cherchons refuge, lui que nous n’aimons pas d’un cœur entier et pur. Aussi le prophète pleure-t-il sur nous qu’il voit flotter dans une telle inconstance : Malheurs aux esprits doubles, dit-il ; et encore : Jusqu’à quand clocherez-vous des deux genoux ? De plus l’apôtre Jacques dit : L’homme à l’âme double est instable en toutes ses voies.

            Nous voilà donc placés, nous qui ne mettons pas une foi entière et parfaite à suivre notre Seigneur et à nous éloigner des dieux étrangers, pour ainsi dire en pleine zone frontière : maltraités par eux comme fugitifs, sans être, parce qu’instables et indécis, défendus par notre Seigneur.