1 Pierre 2, 1-17 ou Apocalypse 21, 9-27

Des significations différentes de la cathédrale dans le tissu urbain

tout au long de l’histoire

José Ignacio Linazasoro

Communio, Tome 46, 2021, n° 2-3, p. 65s

 

Les cathédrales médiévales, à l’époque où elles commencent à se distinguer des églises paroissiales par leur échelle et leur symbolisme, furent conçues comme des éléments émergents, ou couronne de la cité. Dans le tissu médiéval européen, la place était fondamentalement celle du marché dont le parvis de la cathédrale était seulement un prolongement extérieur. Dans un tissu urbain où s’entremêlaient les fonctions publiques et les fonctions privées, la cathédrale constituait un lieu destiné, non seulement au sacré, mais aussi à des usages profanes. A l’intérieur, se déroulaient des échanges commerciaux ou des négociations politiques, et les pèlerins pouvaient y dormir.

La situation changea radicalement à la Renaissance et au temps du Baroque où l’on se mit à rénover et réguler le tissu urbain médiéval. A cette époque, l’idée de monument hérité de l’Antiquité renaît, avec l’environnement requis dans lequel il devrait s’intégrer. La cathédrale est dès lors considérée comme un monument, ce qui exige un environnement adéquat dans le nouveau tissu urbain. La place qui remplace ou amplifie l’ancien parvis n’appartient plus seulement à la cathédrale, comme une extension de celle-ci, mais fait déjà partie de la ville entière. En aucun cas,  le bâtiment n’a été isolé, mais, au contraire, on s’est efforcé d’intégrer la cathédrale dans le tissu urbain. Nous pouvons conclure que ces interventions d’embellissement ont permis l’insertion des cathédrales médiévales dans un environnement nouveau, sans rien perdre de leur importance, ni de leur échelle, bien au contraire.

A partir du XIX° siècle, un processus très différent se produisit qui affecta significativement l’environnement et la nature des cathédrales ; ce processus culminera avec l’isolement de certaines cathédrales françaises et entraînera la perte d’intégration et d’échelle dans le nouveau  tissu urbain. Dans ce sens, les nouveaux critères de restauration des monuments correspondaient au dégagement progressif de l’environnement des cathédrales : en faisant cela, on prétendait mettre l’accent sur leur singularité et leur monumentalité en les libérant de tout type d’ajouts qui ne correspondaient pas à un supposé prototype original.

Les projets de ce type, prétendument destinés à détacher la monumentalité des cathédrales en faisant ressortir la pureté architecturale libre d’ajouts, ont en réalité contribué à leur isolement et en conséquence à leur perte d’échelle.