Genèse 3, 1-15 ou Romains 5, 12-21

Pleine de grâce, Immaculée

Paschase Radbert

Sermon pour l’Assomption de la Vierge Marie, 5ème sermon, n° 9

 

Quelle était la sainteté unique de la bienheureuse et glorieuse Marie toujours vierge, l’ange l’annonça par ces paroles divines : Réjouis-toi, pleine de grâce, le Seigneur est avec toi, tu es bénie entre toutes les femmes. Il convenait, en effet, qu’elle fût comblée de dons au point d’être pleine de grâce, la Vierge qui donna la gloire aux cieux, le Seigneur à la terre, qui rendit la paix et la foi aux nations, mit une limite au mal, rétablit l’ordre de la vie et la rectitude des mœurs. Elle est pleine de grâce, car, aux autres hommes, la grâce est accordée par degrés, mais Marie, elle, fut remplie de toute la plénitude de la grâce en un instant. En Marie, vint la plénitude de toute la grâce celle-là même qui est dans le Christ, mais d’une manière différente. C’est pourquoi l’ange lui dit : Tu es bénie entre toutes les femmes. Ainsi, toute la malédiction répandue par Eve fut détruite par la bénédiction de Marie.

Salomon, dans le Cantique des Cantiques, chante sa louange : Viens ma colombe, ma toute belle, voilà l’hiver passé, les  pluies ont cessé et s’en sont allées. Viens du Liban pour être couronnée. Ce n’est pas en vain qu’il lui est ordonné de venir du Liban, car ce terme évoque la blancheur éclatante. Toute pure, en effet, était Marie par l’éclat de ses vertus, et plus blanche que la neige, rayonnante des dons de l’Esprit-Saint, montrant en toute chose la simplicité de la colombe. Tout ce qui s’opéra en elle ne fut que pureté et simplicité, vérité et grâce ; tout lui vint de la miséricorde et de la justice, celle qui se penche du ciel. Marie est donc Immaculée parfaitement intègre ; elle a enclos un homme en son sein, selon Jérémie, sans le recevoir d’ailleurs : Le Seigneur fera du nouveau sur la terre, dit-il, et la femme entourera l’homme.

Nouveauté singulière et unique : Dieu que le monde ne peut porter, que nul ne peut voir sans mourir, s’est fait l’hôte du sein de Marie sans porter  atteinte à son intégrité. Il y fut porté de telle sorte que Dieu tout entier reposait en elle et il en sortit la porte demeurée close, selon la parole d’Ezéchiel. Et le Cantique nous fait entendre ce chant : Jardin fermé, fontaine scellée, tes jets font un verger de grenadiers secs avec les fruits les plus exquis. Vrai paradis de délices où sont semées toutes les espèces de fleurs avec les parfums des vertus ; jardin si bien clos qu’aucune tromperie insidieuse ne peut le violer, ni le corrompre. Fontaine scellée du sceau de la Trinité tout entière.