Luc 1, 26-38

Saint Bède le Vénérable

Première homélie pour le temps de l’Avent, PL 94, n° 9, 11 et 13

 

La genèse de notre Rédemption nous est montrée dans l’Evangile de ce jour qui narre comment, du ciel, l’ange fut envoyé par Dieu à la Vierge : il lui annonça la naissance du Fils de Dieu dans la chair, naissance nouvelle par laquelle, tout mal et toute vétusté rejetés, nous serons désormais comptés parmi les fils de Dieu.

Pouvait-il y avoir commencement plus adapté à la restauration de l’homme : un ange fut envoyé par Dieu pour consacrer la Vierge par un enfantement divin, puisque le première cause de la perte de l’homme fut le serpent envoyé par le diable pour abuser la femme par l’esprit d’orgueil ? Bien plus, dans le serpent, le démon même était là pour dépouiller de la gloire de l’immortalité le genre humain séduit dans ses premiers parents. Puisque la mort était entrée par une femme, il convenait que la vie revînt par une femme. Celle-là séduite par le serpent, suppôt du diable, offrit à l’homme un aliment au goût de mort ; celle-ci, instruite par l’ange envoyé de Dieu, offrit au monde l’auteur du salut.

En l’ange s’approchant dit à Marie : Réjouis-toi, comblée de la grâce divine. Oui, vraiment comblée par la grâce était celle à qui fut donné d’engendrer Jésus-Christ, source unique de grâce et de vérité. Et le Seigneur était avec elle, lui qui, par l’amour d’une toute neuve pureté, l’emporta au-dessus des choses terrestres vers le désir des biens célestes, puis la consacra de la plénitude de sa divinité par la médiation de sa nature humaine. Vraiment bénie entre les femmes, elle eut le bonheur unique, chez la femme, d’unir la beauté virginale à la fierté maternelle, et, comme il convenait à une mère vierge, de donner naissance à un fils qui fût Dieu.

L’ange ajouta : L’Esprit-Saint viendra sur toi et la puissance du Très- Haut te prendra sous son ombre. Nous disons que nous sommes à l’ombre lorsque, à la chaleur brûlante de midi, nous interposons, entre le soleil et nous, un arbre ou quelque autre ombrage qui nous rend ainsi plus tolérable son ardent éclat. La lumière et l’ardeur du soleil ne sont-elles pas des images parfaites de notre Rédempteur, lui qui nous illumine de sa science de vérité et nous enflamme d’amour ? Pour vous qui craignez mon nom, le soleil de justice brillera, avait prophétisé Malachie. Les rayons de ce soleil pénétrèrent en la bienheureuse Vierge lorsqu’elle conçut le Seigneur. Mais, ce soleil, qu’est la divinité de notre Rédempteur, s’est en quelque sorte caché sous le vêtement de la nature humaine comme sous un ombrage pour permettre aux entrailles de la Vierge de le porter. Ainsi la puissance du Très-Haut la couvrit de son ombre quand la force divine du Christ l’emplit de sa présence et tout ensemble se voila sous la fragilité de notre nature, pour que la Vierge pût le recevoir.