Isaïe 31, 1-3 + 32, 1-8

Dieu s’est révélé aux prophètes depuis longtemps

Saint Irénée de Lyon

Contre les Hérésies, Livre IV, 11, 1-3, SC, p. 434s

 

Les prophètes et aussi beaucoup de justes, connaissant d’avance, par l’Esprit, l’avènement du Fils de Dieu, implorèrent la grâce de parvenir à ce temps où ils pourraient voir de leurs yeux leur Seigneur et entendre ses paroles. Voilà ce qu’a montré clairement le Seigneur, quand il a dit à ses disciples : Beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que voyez et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l’ont pas entendu.

Or, comment auraient-ils désiré voir et entendre, s’ils n’avaient pas connu par avance son avènement ? Comment l’auraient-ils connu par avance, s’ils n’en avaient reçu de lui la connaissance anticipée ? Comment les Ecritures lui rendraient-elles témoignage, si le Dieu unique n’avait, sans cesse, tout révélé et indiqué aux croyants, à l’avance, par son Verbe ? Tantôt, il s’entretenait avec l’ouvrage façonné par ses mains, tantôt il leur donnait la Loi ; il les reprenait ou les encourageait, puis, les libérant de la servitude, il faisait de lui son Fils ; enfin, au temps favorable, il leur accordait en héritage l’incorruptibilité pour son parfait accomplissement. Car Dieu a façonné l’homme afin qu’il croisse et se développe.

C’est justement sur ce point que Dieu diffère de l’homme : Dieu fait, tandis que l’homme est fait. Celui qui fait est toujours le même, celui qui est fait doit recevoir commencement, accroissement, achèvement. Dieu dispense ses bienfaits, tandis que l’homme les reçoit. Dieu est parfait en tout, égal et semblable à lui-même, tout entier lumière, tout entier esprit, tout entier substance, source de tous les biens. L’homme, lui, reçoit progrès et croissance vers Dieu. Car, autant Dieu est toujours le même, autant l’homme qui se trouve en Dieu progressera toujours vers Dieu. Dieu ne cessera plus de combler et d’enrichir l’homme que l’homme ne cessera d’être comblé et enrichi par Dieu. Ainsi l’homme, reconnaissant envers celui qui l’a fait, sera le réceptacle de sa bonté et l’instrument de sa glorification ; au contraire, l’homme, ingrat, méprisant pour celui qui l’a modelé, insoumis au Verbe divin, sera le réceptacle du juste jugement de Dieu.