Luc 9, 51-62

Rejet de la part d’un village samaritain

Père Stéphane Beaubœuf 

La montée à Jérusalem, le dernier voyage de Jésus, p. 19s

 

L’évangile de ce jour, avec l’inhospitalité des Samaritains, pose la question qui détermine l’ensemble de ce chapitre de Luc : le problème de la réception des envoyés, donc celui de la réception de la parole, et de la réaction des envoyés.

La montée à Jérusalem commence mal, et le lecteur comprend dès son ouverture la raison pour laquelle Jésus a affermi sa face : l ‘hostilité est présente dès le début. Cependant les velléités de punition, exprimées par Jacques et Jean, sont immédiatement empêchées par Jésus : sa réaction est décrite par Luc en quatre mots, dans une phrase lapidaire : Mais lui, se retournant, les interpella vivement, réaction qui, par son caractère elliptique, laisse le lecteur dans l’ignorance de ce que le Maître enseigne alors à ses disciples ; cet effet de suspension prépare tout le récit de la montée et toutes les instructions qu’il contient : tout ce voyage consiste en effet en une longue explication des causes du comportement de Jésus. Luc démontre ici sa maîtrise de l’art littéraire, car le vrai éclair de la scène n’est pas celui que Jacques et Jean ont demandé, mais justement la phrase lapidaire qui décrit la réaction rapide et comme fulgurante de Jésus, mais lui, se retournant, les réprimanda : les disciples ne demande pas leur reste et le récit s’achève presque immédiatement sur quelques mots supplémentaires racontant le départ vers un autre village.

Dans leur demande, Jacques et Jean font référence à un épisode du cycle d’Elie dans lequel celui-ci prouve son statut de prophète en faisant descendre le feu du ciel pour détruire les messagers d’Ochosias. Le texte de Luc présente alors plus clairement Jésus comme l’antitype d’Elie, puisqu’il refuse de l’imiter. 

Une autre addition est plus explicite encore, on ne la trouve pas dans tous les manuscrits : quelques témoins complètent ainsi un verset : Et il dit : vous ne savez pas de quel esprit vous êtes : le Fils de l’homme n’est pas venu perdre des vies humaines, mais les sauver. Nous retrouvons une version de cette parole de Jésus au chapitre 19 de l’évangile de Luc : il constitue en quelque sorte la pointe de la montée vers Jérusalem, c’est-à-dire le message d’accueil et de paix apporté par Jésus.