Joël 1,13 – 2,11

La pratique de la perfection : détachement, attachement

Père Théodule Rey-Mermet

La doctrine spirituelle, in Alphonse de Liguori, Pasteur et Docteur, p. 289s

 

La pratique de la perfection, on la découvre dans le premier livre qui soit sorti de la plume d’Alphonse de Liguori. A la fin d’un petit volume consacré à sainte Thérèse de Jésus, il ajoute un petit opuscule : Brève pratique de la perfection. Cet opuscule risque de passer inaperçu, écrasé par les grandes œuvres qui verront le jour à partir de 1750. 

Cette brève pratique s’ouvre par la formule-clé dont toute la suite n’est que le développement concret : Toute la perfection consiste à mettre en pratique ces deux choses : le détachement des créatures et l’union avec Dieu. Tout est dit dans la grande maxime que nous a laissée Jésus-Christ : Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il renonce à lui-même et prenne sa croix, et qu’il me suive. Cet enseignement est vieux comme l’évangile : cette formule simple et vigoureuse porte la synthèse définitive de la doctrine ascétique de saint Alphonse.

Se détacher du monde où rien n’a de consistance pour aller à la découverte de la Plénitude. De quelle Plénitude ? Le détachement chrétien est un bon en avant vers Celui qui est, personnellement, la Plénitude. L’union à Dieu, bien sûr. Saint Alphonse reprend alors cet aphorisme de sainte Thérèse : Que ton désir soit de voir Dieu ; ta crainte, de le perdre ; ta joie, tout ce qui peut conduire à Dieu. Pour s’attacher à Dieu, pour s’unir à lui, n’avoir qu’une crainte : celle du péché qui en sépare, n’avoir qu’une volonté : la volonté de Dieu. Enflammer et ranimer sans cesse cette union dans l’oraison, la nourrir dans la communion ; la demander dans la prière ; la vivre consciemment dans la présence ; la relancer dans la prière liturgique ; la concrétiser enfin en toute occasion de générosité et dans le don de soi au prochain.

Saint Alphonse commentera cela trente ans plus tard : Aimer Dieu de tout son cœur, cela comporte deux choses : la première est de rompre tout attachement qui n’est pas pour Dieu et selon Dieu… La seconde est l’oraison, par laquelle le saint amour envahit le cœur. Mais si le cœur ne se vide pas de la terre, l’amour n’y peut entrer, parce que la place est prise. Par contre un cœur détaché de toutes les créatures s’enflamme aussitôt d’un amour divin qui grandit à tout souffle de la grâce.