1 Corinthiens 7,25-40 ou Apocalypse 7,9-17

« C’est la vérité »

Christian Feldmann

Edith Stein, juive, athée, moniale, p. 49s

 

Les grandes figures de la foi n’ont jamais été très bavardes sur ce processus intérieur bouleversant auquel nous avons l’habitude de coller l’étiquette de conversion, en le rangeant au rayon des bonnes vieilles légendes. 

Pour Edith Stein, ce sont les expériences mettant en évidence la force de la foi dans la vie de tous les jours qui lui ont donné à réfléchir, des expériences comme celle dont elle rendra compte au sortir d’une visite de la cathédrale de Francfort : « Nous entrâmes quelques minutes dans l’église et, alors que nous observions un silence respectueux, une femme entra avec un panier à provisions et s’agenouilla pour faire une petite prière. C’était pour moi quelque chose de tout à fait nouveau. On se rendait dans les synagogues et les églises protestantes que j’avais visitées que pour le culte. Là, dans cette église déserte, quelqu’un s’était arraché un instant à ses occupations matérielles pour se plonger dans un dialogue intime. Je n’ai jamais pu l’oublier ».

Pendant quelques années, Edith avait encore peur de faire le pas décisif. « Le message de la foi est adressé à beaucoup de personnes qui ne l’accueillent pas », écrira-t-elle à la fin de sa vie. L’heure de la grâce n’avait pas encore sonné pour elle. Cette heure, pour reprendre son image, arriva lors d’un séjour de vacances chez un couple ami. Un soir de l’été 1921, ses deux amis s’étant absentés, Edith, qui s’ennuyait, prit par hasard un livre sur un rayon et tomba sur l’autobiographie de sainte Thérèse d’Avila, la réformatrice du Carmel du XVI° siècle, une femme à la fois énergique et profondément mystique. « Je me mis à lire et je fus immédiatement captivée. Je ne m’arrêtai pas jusqu’à la fin. Lorsque je refermai le livre, je me dis : C’est la vérité ! »

C’est tout ! C’est là la seule information qu’elle nous fournit sur cette nuit décisive. Nous ignorons à quel point elle a été subjuguée par ce qu’elle a découvert. S’est-elle reconnue elle-même en Thérèse, la mystique ? A-t-elle trouvé une réponse convaincante à la question qu’elle se posait au sujet du cœur de la personne et de l’objet de tous ses désirs ? La foi, formulera-t-elle, veut davantage que des vérités isolées sur Dieu. Elle veut Dieu lui-même, Dieu qui est la vérité, Dieu tout entier. La foi le saisit sans voir. Ce Dieu qui est le Tout venait de faire irruption dans sa vie.