Qohélet 8,5 – 9,10

Le sort de l’homme

Père André Barucq

Ecclésiaste, p. 157s

 

Affirmer que tous les hommes sont dans la main de Dieu ne résout pas le problème d’une rétribution, en fait déconcertante. Aussi Qohélet va maintenant y revenir, non dans l’espoir de lui trouver une solution, mais pour en dégager certaines composantes.

Qohélet a déjà touché, à plusieurs moments, la question du sort de l’homme. Il s’étonne une fois de plus de le trouver semblable pour tous. Au début de son livre, il mettait en cause le sage et le sot, l’homme et la bête ; dans le texte entendu, le juste et le méchant, le pur et l’impur, celui qui prête serment et celui qui refuse de jurer. Ce faisant, il s’engage dans une nouvelle voie : la réflexion sur la rétribution morale. Plusieurs des catégories d’attitudes opposées se réfèrent au domaine de la religion : celui qui sacrifie et celui qui ne sacrifie pas, bon et pécheur, pur et impur, l’impureté légale étant considérée comme excluant de toute participation à un acte religieux. Il est difficile de citer quelque référence à une disposition légale, morale ou religieuse, dans le fait d’admettre le recours au serment ou de s’y refuser. En Matthieu 5,34 apparaît et il semble bien que ce soit pour la première fois dans l’Ecriture, l’interdiction absolue du serment.

Toujours est-il que Qohélet stigmatise l’ordre des choses qui impose à tous le même sort. Est-ce le mot mal, mauvais qui a amené la remarque moralisante : Le cœur des humains est rempli de malice, la sottise est dans leur cœur durant toute leur vie et leur avenir est chez les morts ! Ce verset se rattache à des axiomes de sagesse tels que ceux que l’on trouve dans le premier recueil de Proverbes. Qohélet se montre d’ailleurs plus pessimiste que Proverbes en ce qui concerne le cœur humain. Les sages voyaient bien la sottise naturellement installée au cœur du jeune homme, mais la discipline pouvait l’en libérer. Qohélet ne croit pas à la possibilité d’une conversion à la sagesse et à la vertu : tout finira chez les morts au Shéol.