Ephésiens 4, 1-16

« Suis-moi »

Jean Tauler

Sermons, Sermon 64 sur saint Matthieu, p. 522s

 

Notre Seigneur dit à saint Matthieu : Suis-moi, et celui-ci, quittant tout, le suivit.

Cet aimable saint a été un modèle pour tous les hommes ; il avait d’abord été un grand pécheur, comme l’évangile l’écrit de lui, et il devint plus tard un des grands parmi tous les amis de Dieu, car Notre Seigneur lui parla dans le fond intérieurement, et alors il abandonna tout pour suivre le Maître. Suivre Dieu en vérité, tout est là, en effet, et pour ce faire, il faut vraiment et complètement abandonner toutes les choses qui ne sont pas Dieu, quelles qu’elles soient, tout ce que l’homme trouve dans son fond d’attache à n’importe quelle créature vivante ou morte, à lui-même ou à quelque chose de lui. Car c’est des cœurs que Dieu est amoureux ; il n’a pas d’intérêt à ce qui est extérieur, mais il veut de nous une dévotion intérieure vivante, comportant une inclination toujours prête à tout ce qui intéresse Dieu et la vertu, où que ce soit et en qui que ce soit. Cette dévotion a en soi plus de vérité que si je faisais des prières autant que le monde entier, ou que si je chantais à si haute voix que mon chant atteignit le ciel, plus de vérité que tout ce que je pourrais faire extérieurement en jeûnes , veilles et autres pratiques.

Reprenons le mot de Notre Seigneur : Suis-moi ! L’homme suit notre Seigneur en pratiquant six vertus : trois appartiennent aux facultés inférieures, trois aux supérieures. Celles des facultés inférieures sont l’humilité, la douceur et la patience ; les trois autres s’élèvent au-dessus de toutes les facultés : ce sont la foi, l’espérance et la charité. Notre Seigneur nous dit donc : Suis. Cette poursuite se réalise d’une première façon quand on s’attache par le désir, la reconnaissance et la louange à l’aimable modèle qu’est Notre Seigneur. Mais elle peut prendre aussi un chemin plus direct, quand, sans rien d’autre que le calme abandon du plein silence intérieur d’une âme recueillie, nous attendons simplement que Dieu veuille bien opérer en nous le bien le plus pur et le plus élevé qui soit ou puisse être, selon son bon plaisir.