Luc 10, 1-9

La source et la besace

Saint Augustin

L’évangile selon saint Luc commenté par les Pères, PdF 34, p. 78s

 

Comment devons-nous comprendre les ordres que le Seigneur donne à ceux qu’il envoie annoncer l’Evangile. Considérons en esprit la moisson sur pied. N’emportez pas, dit-il, de bourse, pas de besace, pas de chaussures, et ne saluez personne en chemin. En quelque maison que vous entriez, dites d’abord : Paix à cette maison ! S’il se trouve un enfant de paix, votre paix ira se reposer sur lui, sinon elle vous reviendra. Mais cette paix s’est reposée sur quelqu’un, on ne l’a plus dira-t-on. N’ayez pas de ces idées ! Il ne fait pas prendre cela à la lettre ! Pas plus que les propos sur la bourse, sur les chaussures, la besace ; pas plus que la phrase, qui, comprise sans interprétation, serait apparemment une invitation à l’orgueil : Ne saluez personne !

Tournons-nous vers le Seigneur, notre exemple et notre secours : Sans moi, dit-il, vous ne pouvez rien faire. Preuve qu’il est notre secours. Le Christ a souffert pour nous, dit Pierre, nous laissant un modèle pour que nous suivions ses traces. Le Seigneur lui-même avait une bourse pour la route, et c’est cette bourse qu’il avait confiée à Judas. Or il avait affaire à un voleur. Moi qui désire tirer du Seigneur un enseignement, je lui dis : Seigneur, tu laissais faire ce voleur : où prenais-tu la force de le laisser faire ? Tu m’as dit, à moi, un homme misérable, un homme faible, de ne pas emporter de bourse, et toi tu as porté une bourse, et c’était pour te faire voler ! Su tu le l’avais pas eue, il n’aurait pas eu de quoi te voler. Que faire, si ce n’est le Seigneur nous dire : Comprends bien ces mots : N’emportez pas de bourse. Qu’est-ce que la bourse ? Ce qui enferme de l’argent : Ne portez pas de bourse, ne détenez pas la sagesse pour vous-mêmes, pour vous seuls ; accueillez l’Esprit-Saint, soyez une source, et pas une bourse ! Non pas thésauriser, mais y faire puiser ! Voilà pour la besace, pour la bourse.