Siracide 15, 11-20

« Dieu a laissé l’homme à son conseil »

Saint Augustin

Sur la peine et la rémission des péchés, OC 30, p. 156s

 

Frères, suivant le don qui nous est fait, sachons et comprenons que Dieu, le Seigneur plein de bonté n’accorde pas toujours, même à ses saints, une connaissance complète et un amour parfait du bien, afin qu’ils sachent que ce n’est pas à eux-mêmes, mais à lui qu’ils doivent la lumière qui éclaire leurs ténèbres, et la bénédiction qui fait porter son fruit à la terre qu’ils habitent.

Quand nous prions Dieu de nous donner sa grâce pour pratiquer et accomplir la justice, que demandons-nous, sinon qu’il nous fasse connaître ce qui était caché, et qu’il nous fasse aimer ce qui nous déplaisait ? Et c’est sa grâce qui nous a inspiré de demander ce que nous ne connaissons pas, et d’aimer ce que nous n’aimions pas afin que celui qui se glorifie ne se glorifie pas lui-même, mais dans le Seigneur.

L’homme qui s’élève à des pensées d’orgueil fait un acte de sa propre volonté ; ce n’est pas l’œuvre de Dieu, Dieu ne le pousse pas à ces actes et ne lui donne aucune aide. L’homme porte donc dans sa volonté un certain amour de sa propre puissance, et il devient désobéissant par orgueil. Si l’homme n’avait pas été possédé de cet amour exagéré, rien ne lui aurait coûté ! Il aurait voulu, et sa volonté aurait cédé sans difficulté. Mais sa punition fut d’être bouleversé dans sa nature, et d’obéir péniblement à la justice. Si la grâce ne vient nous aider à dompter l’orgueil, la conversion n’est pas possible ; si l’opération de la grâce ne guérit cette blessure, on ne peut arriver à jouir de la paix qui est un fruit de la justice. Comment triompher, comment guérir, si ce n’est par la grâce de celui à qui nous disons : Convertissez-nous, ô Dieu notre Sauveur, et détournez de nous votre colère. S’il le fait par miséricorde, nous pouvons dire avec le psalmiste (102,10) : Il ne nous a pas traités selon nos péchés, il ne nous a pas punis selon la grandeur de nos iniquités. 

S’il ne le fait pas, c’est par justice. Pourriez-vous lui dire : pourquoi avez-vous fait ainsi, lui dont les saints chantent avec amour et miséricorde la justice ? Cette conduite de Dieu n’a pas pour but de nous perdre, mais de nous rendre plus humbles et de nous faire apprécier sa grâce. Ne nous regardons pas nous-mêmes, mais élevons en haut notre cœur, et rendons grâce au Seigneur notre Dieu, et lorsque nous nous glorifions, glorifions-nous en lui.